Le continuum est en passe de réveiller tous les problèmes liés au système éducatif. Depuis son annonce, on ne compte plus les voix qui s’élèvent contre cette décision. La Coalition nationale de lutte contre la vie chère, la corruption, la fraude, l’impunité et les libertés (Ccvc) donne également de la voix.
Elle a tenu une conférence de presse le 8 octobre dernier pour présenter son plan d’action «pour une école démocratique et populaire accessible aux enfants du peuple».
La coalition compte consacrer tout le mois d’octobre à de vastes campagnes sur toute l’étendue du territoire pour, selon elle, «dénoncer la démission des autorités de la gestion de l’école burkinabè ; les interpeller pour qu’elles se penchent diligemment sur les problèmes de l’éducation ; et appeler les populations à s’organiser et à se battre pour une école accessible aux enfants du peuple et un changement en leur faveur».
Trois grandes campagnes seront organisées à Ouagadougou et clôturées par une marche-meeting le 29 octobre prochain. Pour le 1er vice-président de la coalition, Chrysogone Zougmoré, chaque rentrée scolaire est un casse-tête chinois pour les parents d’élèves qui doivent débourser de plus en plus d’argent pour offrir un enseignement à leurs enfants. L’école burkinabè est en perte de vitesse, et cela est imputable aux différents programmes de développement mis en place.
«Les programmes d’ajustement structurel (Pas) doublement rebaptisés Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté (Cslp) et Stratégie de croissance accélérée de développement durable (Scadd), ainsi que les multiples réformes opérées dans le système éducatif (refondation, système Lmd, continuum) ont conduit le secteur de l’éducation à la ruine», affirme Chrysogone Zougmoré,
Les promesses non tenues du Gouvernement en matière d’éducation ne sont pas en reste.
Le budget consacré au financement de l’enseignement représente 13% du budget de l’Etat soit 1,259 milliards de F CFA, pendant que l’Etat s’était engagé à porter ce taux à 20% conformément aux recommandations de l’Unesco et au cadre d’action de Dakar 2000 sur l’Education pour tous (Ept). La coalition dénonce également le taux de scolarisation qui est de 82% dont 15% dans le privé en dépit des nombreux milliards investis par le Programme décennal de l’éducation de base (Pddeb).
L’adoption du système Licence-master-doctorat dans les universités n’a pas contribué à arranger la donne. Après cinq ans d’application, l’université connaît de sérieux problèmes qui ont même conduit à un blanchiment technique et à de nombreux retards dans le calendrier académique. Pour ne rien arranger, depuis quelque temps, le Gouvernement a décidé de fusionner les niveaux inférieurs du système éducatif ,notamment le préscolaire, le primaire et le premier cycle du secondaire. Cette décision, pas très bien préparée, a créé un désordre aux plans institutionnel, administratif, pédagogique et infrastructurel, estime la coalition.
Des parents d’élèvesdans l’incertitude
Cette rentrée scolaire, le transfert du premier cycle du secondaire a été généralisé avec 350 collèges d’enseignement général (Ceg) placés sous la tutelle du ministère de l’Education nationale et de l’alphabétisation (Mena), avec un déficit infrastructurel estimé à 4.028 salles de classe pour la 6e. Le Gouvernement a été contraint de gérer la situation en envisageant le recours à des locaux de fortune et autres abris précaires selon la coalition. Cependant, cela ne résout pas le problème car le déficit se pose également au niveau des enseignants. Il en manque 3.269. C’est donc dans cette incertitude que naviguent parents d’élèves et les élèves, et le Ccvc, à travers ce mois de mobilisation, compte faire prendre ses responsabilités à l’Etat tout en sensibilisant parents d’élèves sur l’avenir incertain des élèves dans ce système.
Le Mess et le Mena promettent d’ouvrir des discussions
La journée mondiale de l’enseignant a été commémorée le 8 octobre dernier sur un fond de grogne et de mécontentement. Les syndicats de l’éducation ont battu le pavé, dans les artères de la ville de Ouagadougou. Le mouvement avait pour but d’exiger la satisfaction de leur plateforme revendicative remise au Gouvernement depuis 2013. Celle-ci comporte 11 points defendus lors de la grève du 4 octobre 2013. Plus d’une année après, aucune suite favorable n’a été donnée, selon les organisateurs de la marche. Ces derniers sont donc revenus à la charge pour exprimer leur mécontentement.
Pour la célébration de cette journée de l’enseignant, les manifestants ont adressé un message aux ministres en charge de l’Education. Mais en l’absence de sa collègue de l’Education nationale et de l’alphabétisation, c’est au Pr Moussa Ouattara des Enseignements secondaire et supérieur de recevoir en mains propres les revendications des syndicats.
Les syndicats fustigent des réformes telles que le système Licence-master- doctorat (Lmd), le transfert du préscolaire et du post-primaire au Mena dans les conditions actuelles qu’ils qualifient de réponses inappropriées à la crise structurelle du système éducatif.
Les syndicats réclament notamment l’arrêt du processus de transfert, l’adoption d’un statut particulier des personnels de l’enseignement et l’institution d’une indemnité de logement pour les personnels de l’éducation, entre autres.
Cette marche n’est qu’un premier message envoyé au Gouvernement. Les syndicats menacent donc d’aller en grève en cas de silence du Gouvernement.
Le ministre Moussa Ouattara a rassuré ses interlocuteurs de la bonne destination de leur message et assuré que les points de revendications feront l’objet d’une discussion ultérieure entre les syndicats de l’éducation et leurs ministères de tutelle.
Germaine BIRBA