Prévu pour se tenir du 31 octobre au 9 novembre prochain, le Salon international de l’artisanat de Ouagadougou (Siao) a été reporté à une date ultérieure. Les autorités du pays justifient ce report par l’épidémie de la fièvre hémorragique à virus Ebola qui sévit dans la sous-région. Même si aucun cas n’a été signalé dans le pays. Le Siao mobilise plus de 400.000 personnes venant des quatre coins du monde, le Gouvernement a donc jugé nécessaire de le remettre à une date ultérieure, afin de protéger les populations d’une éventuelle contagion.
Cette décision est saluée par de nombreux acheteurs et exposants qui s’inquiétaient des risques liés à la maladie. En effet, le virus Ebola gagne du terrain chaque jour. Parti de la Guinée, le virus s’est propagé dans 5 pays de l’Afrique de l’Ouest, faisant près de 2.000 morts. «Le monde est devenu un gros village. Quand un évènement se passe quelque part dans le monde, nous nous sentons concernés.
Actuellement, nous suivons avec beaucoup d’intérêt la gestion de la maladie à virus Ebola dans la sous-région. Les participants, à titre individuel et même les pays, nous faisaient parvenir leurs inquiétudes. Les projections faites par les spécialistes font état de 6 à 9 mois pour pouvoir maîtriser le fléau. Le Gouvernement a donc décidé de reporter le Salon comme ce fut le cas du sommet des chefs d’Etat et du Sitho. Cette décision est un soulagement pour beaucoup», affirme Abdoulaye Zongo, directeur général du Siao. Ce report n’est pourtant pas sans conséquence. En effet, il intervient à moins d’un mois de l’évènement. Comme le dit Abdoulaye Zongo, «nous étions déjà prêts».
Une grosse campagne de communication avait déjà été lancée pour annoncer l’évènement, sans compter les travaux d’aménagement des stands et bien d’autres. Les responsables du Siao évaluent à plus de 85 millions la somme perdue dans les préparatifs, dont 60 millions dans la campagne de communication. «Nous devons reprendre à zéro lorsqu’une date sera de nouveau fixée». Le son de cloche est le même chez les artisans qui étaient également prêts pour le Siao. Selon les explications des responsables du Salon, certains artisans de l’extérieur avaient déjà acheminé leurs produits en direction du Burkina Faso. Il leur incombe à présent de conserver ces articles en attendant.
Un cas pose également problème à la direction du Siao. Les artisans sur place avaient eux aussi préparé les articles qu’ils devaient exposer. «J’étais fin prêt pour le Siao. J’avais déjà confectionné mes articles. Avec ce report, je serai obligé de les vendre», déclare Ousman Kanté, sculpteur.
La décision de reporter le Siao est diversement appréciée par les artisans burkinabè. S’il y a certains qui en comprennent le bien-fondé, certains s’en offusquent. Les raisons sont diverses. Pour Moussa Tapsoba, président du groupement d’intérêt économique, le report du Siao aurait un impact sur la santé financière de certains artisans qui ont dû s’endetter pour la confection des œuvres. Ces derniers espéraient la tenue de l’évènement pour rentabiliser. «L’année fut mauvaise pour bon nombre d’artisans. Ces derniers ont dû s’endetter pour pouvoir participer au Siao et se refaire une santé financière. Malheureusement, ce report vient anéantir leurs espoirs, d’autant plus que nous ne savons pas quand est-ce que le Siao va se tenir à nouveau», affirme-t-il.
Quant à Abraham Diao, acheteur, lui ne voit pas la nécessité d’une telle mesure. «Je pense que cette décision est plus politique. Le contexte socio-politique crée une psychose chez les autorités. Pour ma part, étant donné que les spécialistes ont affirmé que la fermeture des frontières ou les restrictions de voyages ne pouvaient pas empêcher la maladie de se propager, je pense que le Siao pouvait se tenir.
Avec un peu plus de mesures extrêmes, on aurait pu gérer cela et tenir le Siao. Il faudra que nous évitons de verser dans une paranoïa, au risque de ne plus nous épanouir et de pénaliser de nombreuses personnes. Ce report du Siao est un manque à gagner pour de nombreuses personnes», affirme-t-il. Finalement, même si la décision de reporter le Siao n’est pas vivement critiquée, nombreux sont les artisans qui souffrent en silence et espèrent la tenue très prochaine du Salon.
Report probable de la biennale du cinéma
Après le sommet de l’Union africaine sur l’emploi, le Salon international du tourisme et de l’hôtellerie, le Salon international de l’artisanat de Ouagadougou, c’est au tour du Forum national de la recherche scientifique et des innovations technologiques (Frsit) d’être reporté. La psychose engendrée par la maladie à virus Ebola est bien réelle dans la sous-région, au point que même les pays qui n’ont aucun cas déclaré prennent des mesures drastiques. L’Oms annonçait un délai de 6 à 9 mois pour pouvoir maîtriser la maladie. La 24e édition du Festival panafricain de cinéma de Ouagadougou (Fespaco) est prévu dans 5 mois. Sera-t-il également reporté pour les mêmes raisons? La question reste encore posée et brûle toutes les lèvres.
Germaine BIRBA