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Soum: une province en colère

Les marcheurs du 2 août dernier à Djibo, avec des bandéroles réclamant le bitumage des voies dont celle de Kongoussi/Djibo. Le Burkina a contracté un prêt, en janvier 2014, avec la Bad d'un montant de 23,9 milliards de FCFA pour la construction et le bitumage de cette route
Les marcheurs du 2 août dernier à Djibo, avec des bandéroles réclamant le bitumage des voies dont celle de Kongoussi/Djibo. Le Burkina a contracté un prêt, en janvier 2014, avec la Bad d’un montant de 23,9 milliards de FCFA pour la construction et le bitumage de cette route

La «route du bétail et de l’or» a été bloquée par une grève et la ville de Djibo coupée de la capitale Ouagadougou par Kongoussi. Des jeunes qui crient leur ras-le-bol brandissant des slogans hostiles aux autorités locales, à l’Etat et aux compagnies minières, des barricades à l’entrée de la ville, juste à quelques encablures du pont de la Maison de la Femme de Djibo, des centaines de véhicules bloqués dont ceux de la compagnie minière de la région, la Société des mines de Belahouro.

Voici le spectacle qui a été donné de voir le 2 août dernier, à la veille du marché à bétail de Djibo. Ce marché, qui génère pour l’Etat, les populations et les collectivités territoriales des recettes importantes. La province du Soum, selon les manifestants, ne mérite pas ce statut de laissé-pour-compte. L’état de la route plombe l’activité économique de la ville. C’est un problème qui perdure depuis des années et face à l’indifférence des autorités, la population est sortie de son silence.

C’est le gouverneur en personne qui en a fait les frais. Son intervention sur une radio de la place, après une rencontre avortée avec les manifestants, n’a pas été appréciée. Bloqué par des manifestants en colère pendant quelques heures, il fut libéré par les éléments de la CRS, qui ont procedé à des arrestations. Djibo passe pour un bastion du pastoralisme au Burkina Faso. En effet, le marché à bétail de Djibo est le plus grand en termes de petits ruminants. Les ressources minières, sont egalement prometteuses pour que la zone soit délaissée en termes d’infrastructures.

Depuis le 15 août dernier, la compagnie de transport la plus importante, qui envoyait ses cars au garage à chaque arrivée, a décidé de détourner son trajet et de ne plus passer par le tronçon Kongoussi-Djibo. Elle passe par Ouahigouya, une déviation qui rallonge le trajet de cent soixante kilomètres environ. De quoi fâcher davantage les commerçants, avec le surcoût financier que cela occasionne et la perte de temps. Pour un voyage sur 200 km en direction de la capitale, un passager de Djibo raconte que ce fut un calvaire. Parti à 13 heures, il s’est retrouvé à Ouagadougou à 23 heures après cinq pannes du véhicule sur le trajet. Or, il a emprunté la meilleure compagnie qui soit.

Excédée par l’état de dégradation continue du tronçon Kongoussi-Djibo (environ 100km), la  jeunesse du Soum a décidé de passer à l’action depuis sa dernière sortie de 2011. Elle a décidé d’assumer de façon «plus énergique et concrète» son destin, à travers des actions d’interpellation de l’Etat.

Cette situation que vit la province a de graves conséquences sur l’économie du pays, car l’isolement de Djibo coupe l’approvisionnement à bétail du pays, voire de la sous-région (Ghana, Côte d’Ivoire, Mali). La goutte d’eau qui a fait déborder le vase, c’est l’état de plus en plus dégradé de cet axe d’à peine 100 km et la non tenue des promesses gouvernementales pour le démarrage des travaux de bitumage. En effet, les raisons de manifester ne manquaient pas. Les infrastructures sur le tronçon tombent en désuétude et pas un seul début de travaux à l’horizon. Les ponts de la route nationale 22(RN 22) en question connaissent une dégradation de leurs bétons à bien de niveaux. Le voyage sur ce tronçon devient donc une galère, un enfer, voire une ascension du mont Golgotha.


 

Vous avez dit Mouvement «M26» ?

 

Il est le dernier né des mouvements sociaux de jeunes à Djibo. Cette structure au nom assez évocateur a une organisation qui en dit long. Elle a connu plus d’adhésions parce qu’elle a bâti son travail sur les erreurs des autres structures. Le mouvement n’a pas de bureau exécutif.

Il a un porte-parole et des membres venus de divers horizons.  Il ne reçoit pas d’argent, mais des dons en nature car «l’argent gâte les relations humaines et les luttes», déclare monsieur Bâ, le responsable.

Des mouvements pour bloquer la voie

 

Ces deux structures de la société civile, à savoir la Coordination provinciale des associations de jeunesse (Copajes) et le Mouvement des jeunes dénommé Mouvement du 26 août 2014 ou «M26», ont organisé ces actions citoyennes pour mieux faire entendre leur colère passant ainsi de la flute à la trompette. La première action a eu lieu le samedi 30 août 2014 sur les artères de la ville de Djibo. Après environ trois heures de manifestation, les marcheurs ont été reçus par les plus hautes autorités de la province, à savoir le haut-commissaire, Mohamed Dah, le 1er adjoint au maire, Dicko Issa Idrissa, le préfet Jonas Mané, le commandant de la gendarmerie et le directeur provincial des infrastructures.

Le deuxième mouvement citoyen a été conduit par M26 le lundi 1er août 2014 à 7 heures. Un sit-in a eu lieu à cette date, durant toute la journée. Là encore, l’obtention d’une garantie des autorités que le démarrage des travaux sera effectif était encore à l’ordre du jour. Cette initiative n’a pas connu écho favorable, car le lendemain, les jeunes et leurs sympathisants devaient se réunir cette fois pour barrer la voie. «Personne ne sort, personne ne rentre par cet axe», déclare l’un des responsables du mouvement. Une démarche qui a connu l’adhésion des populations qui n’ont pas hésité à envoyer qui des sachets d’eau aux jeunes, qui des consommables pour que la situation perdure et voit éventuellement un début de résolution.

RS

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