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Forum Banque et Justice, ou comment apaiser le climat

Le 12 juillet, s’est tenu à Ouagadougou le premier forum sur les relations Banque-justice. Cet évènement a été organisé par l’Association professionnelle des banques et établissements financiers du Burkina (Apbef). L’objectif de cette rencontre : parvenir à la réduction du risque lié à l’insécurité judiciaire et aboutir à la création des bases pour des échanges entre banquiers et magistrats.
On ne peut pas dire que l’heure est grave, mais si c’est la fédération panafricaine qui a instruit ses membres d’organiser de tels fora, c’est que le phénomène de l’insécurité judiciaire inquiète plus d’un banquier dans la zone Uemoa. D’où cette idée de réunir banquiers et hommes de loi autour d’une même table pour discuter du particularisme de l’industrie bancaire, afin de permettre à celle-ci de continuer de financer l’économie. Les contentieux se multiplient et les recouvrements deviennent quasi impossibles dans certains pays. Car, comme l’a fait observer le président de la Fapef-Uemoa, lors de la rencontre de mars dernier à Ouaga, le créancier dans certains cas, le banquier se retrouve être débiteur de son client après certains jugements. Il fallait tirer la sonnette d’alarme. Une fois n’est pas coutume, les banquiers qui n’aiment pas le « bruit » ont décidé de communiquer. Il s’agissait d’expliquer le particularisme de la profession bancaire tout en dégageant « les aspects qui assurent que ce particularisme reste fidèle au principe généraux du droit ». Un exercice délicat pour des banquiers coincés entre la nécessité d’expliquer la complexité de leur métier aux hommes à la toge sans pour autant demander des faveurs, toute chose qui serait d’ailleurs mal venue. Le fait est que les institutions de financement et de crédit ont le sentiment, à tort ou à raison, que les juges entrent trop facilement en voie de condamnation contre elles dans les litiges qui les opposent à leurs clients. Le tout était de savoir comment poser le problème sans heurter les susceptibilités. Premier accroc, la formulation des Tdr. Certains magistrats ont trouvé les termes trop durs à leur endroit, et ont tenu à le relever. Deuxième remarque des magistrats : il ne faut pas juger la justice burkinabè à l’aune de quelques dossiers hautement médiatisés. Ce serait une erreur d’appréciation, car les juges ont rendu ou rendent bien d’autres décisions qui ne sont pas connues du public. Le président de l’ Apbef, Pierre Zerbo, a donc tenu à relativiser. La situation du Burkina n’est pas aussi alarmante que cela, comparée aux autres pays membres de l’Union même si, fait remarquer discrètement un autre banquier, les montants querellés dans ces quelques dossiers sont plutôt importants. Troisième observation des hommes à la toge, les dossiers de contentieux des banques sont souvent mal présentés, et témoignage d’un magistrat à la clé : les dossiers ne sont pas suivis de près. Les magistrats et hommes de loi en avaient à redire également de l’attitude des banquiers devant leurs juridictions. Mais passé le moment de la clarification, la journée fut plutôt riche en échanges de part et d’autre. Les deux parties se sont parlé et ont souhaité que ce type de rencontres se répète entre les deux parties. Quatre thèmes ont servi de base aux échanges du forum. Les trois premiers thèmes ont servi d’entrée en matière afin de donner une vision complète de l’activité bancaire aux participants essentiellement constitués de banquiers, de magistrats, de juristes de banques et d’universitaires. Il s’agit de celui sur « l’environnement légal et réglementaire de la banque », « la relation de compte bancaire et la responsabilité » et « les instruments de paiement, les opérations de crédit et les garanties des crédits bancaires ». Le quatrième toujours aussi technique que les précédents a porté sur les voies d’exécution, le recouvrement et l’ouverture et mise en demeure de procédures collectives a été présenté par deux magistrats professionnels : le président et la vice-présidente du tribunal de commerce de Ouagadougou.
Ils ont expliqué les procédures et voies de recours en cas de litiges à l’aune de la pratique dans leurs juridictions. Ils ont fait le constat de la mauvaise foi de certains clients de banques en matière de recouvrement et militent pour la réduction des délais afin de permettre aux créanciers d’avoir une chance de récupérer leurs fonds. De façon générale, le forum retient le rôle sensible de l’activité bancaire, les conditions difficiles de travail des magistrats, les difficultés d’accès aux sources du droit bancaire. Sur ce point, unanimement, il a été reconnu qu’une meilleure vulgarisation des textes s’impose. Une recommandation a été faite dans ce sens, appelant à la publication systématique textes bancaires et à la vulgarisation de leur contenu. Des études et l’enseignement du droit bancaire ont été également recommandés.


 

Le nœud du problème

Dans les Tdr portant sur la tenue du forum, on retient à la page 2 le condensé des préoccupations des banquiers par rapport à la justice : « Le règlement des différends bancaires est sujet à des dysfonctionnements qui ont pour noms lenteurs judiciaires, erreurs d’appréciation, saisies et condamnations intempestives, contestations systématiques et expertises tous azimuts, mauvaise appréhension de la question éthique. »

FW

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