• Un modèle bâti sur 150 ans…
• Grâce à l’agriculture, la formation et la stabilité sociopolitique
• Il faut miser sur le transfert de technologie
Et si le Burkina faisait sien le modèle chinois pour accélérer son niveau d’industrialisation ? L’idée n’est ni tabou ni de trop pour le Club des jeunes pour la promotion de la coopération sino-burkinabè (CJPC-BF), qui l’a mise en débat, lors de la 5e édition du Festival de la coopération sino-burkinabè, tenue les 22 et 23 novembre 2024, à Ouagadougou, sous le thème : « Processus d’industrialisation du Burkina Faso : quelle contribution de la Chine ». Et, au cours d’une conférence publique dans le cadre du festival, il a essentiellement été question du modèle d’industrialisation chinois.
Dans une communication chargée d’histoire, le premier conseiller politique de l’Ambassade de Chine au Burkina, Wenzhang Wang, a présenté son pays comme le plus industrialisé au monde. A titre d’exemple, la Chine est devenue, en 2019, le seul au monde où toutes les catégories industrielles sont répertoriées dans la classification industrielle des Nations unies. Selon Monsieur Wang, la Chine industrialisée, c’est une histoire d’au moins 150 ans. L’industrialisation étant, pour ce diplomate, « un processus long et complexe », avec seulement une trentaine de pays et régions sur près de 200 qui l’ont véritablement réussie à ce jour.
Si la Chine antique, chroniquement sous développée, avec alors un PIB en dessous de la moyenne asiatique et mondiale, est devenue la première puissance industrielle, c’est loin d’être le fruit du hasard. Monsieur Wang est remonté à la fin du 19e siècle pour expliquer que le pays a dû procéder d’abord à une réforme institutionnelle et au renforcement de sa défense, en même temps que la maitrise des machines et des connaissances scientifiques occidentales, ainsi que la formation d’un personnel technique : « Des milliers d’enfants ont été envoyés au Japon, aux Etats-Unis pour se former à la technologie », rappelle le diplomate. De même, le commerce et l’agriculture ont reçu une attention croissante dès 1872. « C’est la période de la construction navale, des chemins de fer ; l’exploitation minière et la télégraphie », rappelle Wenzhang Wang. Une autre phase a consisté au développement du textile, avec la naissance des industries semi-gouvernementales et semi-commerciales.
5 millions d’ingénieurs formés par an
Malgré un échec de ce « mouvement d’auto-renforcement » dans les années 1895 », le processus d’industrialisation, relancé en 1949, lors de l’établissement de la République populaire de Chine, connait depuis lors du succès. Le secret ? « Ce succès réside dans le respect des lois communes en la matière mais aussi dans une spécialité nationale chinoise », répond Monsieur Wang. Il explique que la Chine contemporaine a toujours recherché le progrès en maintenant sa stabilité sociopolitique. « Beaucoup de pays ont vu leur processus d’industrialisation s’interrompre par plusieurs facteurs d’instabilité comme les guerres et les troubles sociaux », a-t-il déploré.
Outre la stabilité, l’optimisation de facteurs d’industrialisation regroupant des aspects sociaux, politiques et culturels (la discipline chinoise citée comme exemple de facteur culturel), des facteurs de conditions (main d’œuvre, capital, financements) et des facteurs déterminants comprenant l’innovation technologique, institutionnelle et de gestion est également à prendre en compte.
De l’industrie lourde au départ, l’industrialisation chinoise est aussi passée par une réforme rurale, qui a permis à la population, selon Wenzhang Wang, de libérer la terre pour rejoindre les villes et y fournir une offre presqu’illimitée de main d’œuvre.
Cela s’est accompagné d’un investissement massif dans l’éducation, notamment, l’enseignement technique, pour rendre cette main d’œuvre assez qualifiée. « Dans les années 70, plus de 1000 universités ont été ouvertes en Chine », a expliqué le diplomate qui précise qu’aujourd’hui, son pays forme annuellement 5 millions d’ingénieurs, soit le tiers dans le monde.
Une mobilisation du capital grâce à une habitude de l’épargne des Chinois ; la motivation de capitaux privés et les investissements étrangers ; le développement des systèmes financiers diversifiés ; l’incitation à différents modèles régionaux de développement et la création de banques et de zones de division industrielles sont autant d’autres forces de l’industrie chinoise.
A noter qu’en dehors de la conférence publique, cette 5e édition du Festival a été marquée par une exposition-vente qui a reçu la visite de l’Ambassadeur de Chine au Burkina.
Béranger KABRE (Collaborateur)
Encadré
De l’accompagnement de la Chine
En soutien aux efforts d’industrialisation du Burkina, Wenzhang Wang a cité quelques points de la coopération entre les deux pays à même de créer des conditions favorables, notamment, l’appui dont bénéficie le Burkina dans les secteurs de la sécurité, la santé, l’agriculture, l’éducation et la formation.
Pour réussir ce processus d’industrialisation, un transfert de technologie est nécessaire. C’est l’avis de l’enseignant-chercheur, Dr Daniel Karamlbiri, qui a développé le thème des technologies transversales qui renvoient aux facteurs et moyens technologiques mis en œuvre pour développer un secteur.