• A l’initiative des étudiants en Master Ingénierie bancaire
• Le cas de l’UEMOA et de la BCEAO au centre de la réflexion
• Frontière mince entre risque de change et crise de liquidité
Pour le secteur bancaire de l’UEMOA, 2023 n’aura pas été une année sereine en matière de liquidité. Une batterie de mesures mises en place par la BCEAO pour faire face à l’inflation a fait naître des tensions, faisant ainsi planer sur la zone économique, le spectre d’une crise de liquidité. Parmi ces mesures, on peut retenir un rationnement des crédits, l’augmentation du taux directeur, créant des difficultés d’accès aux financements, sans oublier l’instauration de taux variables. Après analyse de la situation, des experts s’accordent sur le fait que la stabilité du système bancaire de l’espace communautaire tient à la capacité d’anticipation de ses acteurs.
Pour mieux comprendre la situation, le Club des étudiants en Ingénierie bancaire et financière (CEIBF) de l’Institut burkinabè des arts et des métiers (IBAM), en partenariat avec l’Association professionnelle des banques et des établissements financiers du Burkina (APBEF-B), a organisé une conférence publique sur deux thématiques : « la gestion de la crise de liquidité dans la zone UEMOA » et « les opérations de change et la gestion des risques afférents ». Appelés à intégrer le monde professionnel, ces étudiants ont senti le besoin d’avoir des rudiments pour mieux cerner l’environnement économique. « Nous savons tous que le Burkina, le Mali et le Niger sont dans une période de transition et sans être financier, tout le monde a pu constater le ralentissement de l’économie. Beaucoup pensent que la monnaie utilisée par ces pays est la cause de leur sous-développement. En choisissant ces deux thèmes, nous avons voulu permettre à des experts de mieux nous expliquer ce qu’il en est réellement », a confié le délégué général des étudiants, Amidou Ouédraogo.
A cette conférence, le Club a réussi le pari de mobiliser d’éminentes personnalités du monde des finances pour développer les deux thématiques. Il y a eu le Pr Hamidou Sawadogo, Directeur du Fonds Faso Kuna-wili, Jeanne Marie Tani/Ilboudo, Directrice générale de Wend Kuni Bank et vice-présidente l’APBEF-B, Boureima Sawadogo, l’expert-comptable, associé-gérant du cabinet d’expertise FIDALI, pour ne citer que ceux-là.
Dans la communication inaugurale, le Pr Hamidou Sawadogo a défini la crise de la liquidité comme le fait pour les institutions financières (banques commerciales, compagnies d’assurance, fonds de pensions, etc.) de ne pas pouvoir honorer leurs engagements à court terme ; l’une des manifestations de cette crise pouvant être l’absence de billets de banque à émettre contre des chèques ou l’impossibilité de faire convenablement des virements. Selon le Pr Sawadogo, une crise de liquidité conduit le plus souvent à des mesures de rationnement, et « tout rationnement entraîne des conséquences énormes pour le pays. Cela va agir non seulement sur les revenus des individus, mais aussi sur ceux de l’Etat qui tire essentiellement ses revenus à travers les impôts et les taxes de douanes ». En pareille circonstance, l’Etat n’est plus capable de lever des fonds sur les marchés financiers, d’où un abandon de ses investissements, et par ricochet, une absence de marchés pour les entreprises, selon les explications du conférencier.
Pour ce qui est du taux de change, le Pr Sawadogo a expliqué qu’il renvoyait au « prix de la monnaie et que pour le cas des pays de l’UEMOA, il se définit par rapport à la valeur de l’euro, lié au FCFA par un régime nominal à parité ajustable ».
Pour les experts, les risques de change, pour le cas du FCFA, résident, notamment, dans le fait que le taux de change entre le FCFA et l’euro (1 euro pour 654 FCFA) est, certes, considéré comme fixe, mais il ne l’est pas avec le dollar et les autres monnaies. « Nos opérateurs économiques subissent ce risque tous les jours », déplore Pr Salifou Ouédraogo, Directeur de l’Unité de formation et de recherche en Sciences économiques et de gestion à l’Université Thomas Sankara. Pour ce dernier, d’autres risques peuvent s’associer à celui du change, notamment, les risques de liquidité, de crédit et le risque politique.
Parmi les dispositifs curatifs, il y a le recours non seulement aux banques secondaires, mais aussi à la Banque centrale et au régulateur, à savoir la Commission bancaire. Pour les risques de change, il est préconisé, entre autres, la diversification des sources de financement, de sorte que si le risque se présente chez un partenaire, que cela ne soit pas le cas chez l’autre, bien que cette stratégie génère un coût de la surveillance. Il est aussi conseillé d’éviter une dépendance au financement en devises étrangères et de suggérer plutôt des dépôts, l’émission d’Obligations et le recours aux lignes de crédit en monnaie nationale, en plus du termaillage, qui se veut des ajustements opérationnels. o
Béranger KABRE (Collaborateur)
Encadré
Entre risques de change et crise de liquidité, une frontière mince
Entre risques de change et crise de liquidité, la frontière est mince, notent, toutefois, les expertes, réunis par le Club des étudiants en Ingénierie bancaire et financière (CEIBF) de l’Institut burkinabè des arts et des métiers (IBAM), en partenariat avec l’Association professionnelle des banques et des établissements financiers du Burkina (APBEF-B), lors de la conférence publique sur deux thématiques. « Si un risque de change est mal maîtrisé, il peut entraîner des pertes et affecter la position de liquidité », estime, en effet, Hamidou Sawadogo. C’est pour cela que cet expert a préconisé une bonne gestion des risques de change, afin de permettre de « renforcer la résilience des banques face aux chocs ».