• 4.095.000 FCFA, coût réel minimum
• De nombreuses taxes sur le dos du pèlerin
• Et les agences de voyage dans tout ça ?
3.595.000 francs CFA. C’est le coût officiel du Hadj 2023 au Burkina Faso. Ce prix a été fixé de commun accord entre le ministère de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et de la Sécurité (MATDS), la Fédération des associations islamiques (FAIB), le Comité national de suivi du pèlerinage à la Mecque et les agences de voyage, en fonction de certaines informations de l’Arabie Saoudite.
Ce prix global se décompose comme suit : 1.499.166 FCFA pour les prestations saoudiennes, 1.118.750 FCFA pour le billet d’avion et 975.000 FCFA pour les prestations des agences de voyage.
Par prestations saoudiennes, il faut entendre toutes les activités dont l’organisation incombe à la partie saoudienne. Il s’agit de la Mouassassah (un ensemble de service comprenant le logement et la restauration à Mina, Arafat, Muzdalifa) qui coûte 962.000 FCFA, du transport interne à 181.689 FCFA, du visa à 55.500 FCFA, de l’assurance à 5.319 FCFA et des frais de services au sol à 294.659 FCFA.
Le billet d’avion aller-retour coûtera au pèlerin 1.118.750 FCFA, et c’est l’avionneur Fly Nass (Nass air) qui transportera les Burkinabè. Sur chaque billet, l’Arabie Saoudite prélève une taxe dénommée « manutention avionneur ».
Au Burkina Faso, il y a aussi un ensemble de taxes aéroportuaires prélevées et réparties entre les différents services de l’aviation. L’un dans l’autre, entre 75.000 FCFA et 150.000 FCFA du billet d’avion qui vont dans les taxes.
Sur les 975.000 francs de frais d’agence, il faut déduire l’hébergement à la Mecque et à Médine qui varie entre 444.000 FCFA et 555.000 FCFA, uniforme pèlerin (pagnes, sacs de voyage, pochettes à papier) 20.000 FCFA, les cotisations de groupes pour les tâches communes, la prise en charge des encadreurs, les frais de gestion de l’agence…. En fonction de ces différentes charges et surtout du coût du logement, les agences se retrouvent avec un bénéfice compris entre 30.000 et 50.000 FCFA par pèlerin.
Au prix officiel de 3.595.000 FCFA, il faut ajouter 50.000 pour le passeport (sans les autres frais des éléments du dossier), 22.000 pour la visite médicale et le carnet de santé, 150.000 comme le prix du mouton, 150.000 pour la restauration (5.000 par jour, X par les trente jours du séjour) …en somme, chacun doit avoir sur soi au moins 500.000 FCFA pour être à l’abri de désagréments. « En dehors du montant du Hadj, chaque pèlerin doit avoir son argent de poche », a reconnu d’ailleurs le président du comité de suivi, Boubacar Kouanda, précisant que le montant de cet « argent de poche » dépend des moyens du voyageur. Le coût réel minimum pour le Hadj est donc de 4.095.000 FCFA.
Le premier quota du Burkina Faso est de 8.143 pèlerins. 7.000 partiront en vols charters et les 1.143 en vols réguliers. Le pays a fait une demande supplémentaire de 5.000 places , sous réserve d’épuiser son premier quota. Selon le président du comité de suivi du pèlerinage, « les vols réguliers sont pour ceux qui veulent faire moins d’un mois ; deux semaines ou dix jours avant de revenir ». Les départs sont prévus du 4 juin au 18 juin et les retours du 4 juillet au 18 juillet 2023. Les rites sont prévus de la soirée du lundi 26 juin à la soirée du samedi 1er juillet. Le jour d’Arafat, le mardi 27 juin, la fête de Tabaski, le mercredi 28 juin, et la lapidation de Jamarat les 29,30 juin et 1erjuillet. Ces dates sont susceptibles de modifications.
Le jeu des agences de voyage
128. C’est le nombre d’agences de voyage autorisées à inscrire des pèlerins pour le Hadj 2023. Quel est le rôle d’une agence de voyage dans l’organisation du pèlerinage ? Informer et former le pèlerin, le conduire et le loger à la Mecque, à Médine, à Arafat et le ramener à son point de départ qui peut être Ouaga ou Bobo-Dioulasso. Le cahier de charges signé par l’ensemble des agences les oblige à avoir au moins 4 personnes dans la délégation (le responsable, un encadreur titulaire, un encadreur pour les femmes, un technicien). Ces 4 personnes, à la charge de l’agence, doivent accomplir également les mêmes rites que les pèlerins.
« Si j’ai 100 pèlerins, je vais encaisser 359.500.000 FCFA, par exemple. Quand les gens verront cela, ils penseront automatiquement que j’ai eu beaucoup d’argent mais finalement, je n’aurais même pas 3.000.000 dans toute cette somme : la grande partie est reversée au comité du suivi pour l’Arabie Saoudite et le billet d’avion. Avec le peu qui va rester, nous couvrirons nos charges », explique Madi Kabré de Rafic Voyage, pour montrer qu’ils sont accusés à tort de se faire de l’argent sur le dos des pèlerins.
Il y a une dizaine d’années, une étude avait révélé que pour qu’une agence de voyage soit viable sur le Hadj, il lui fallait entre 150 et 200 pèlerins à chaque édition. On devait donc assister à un regroupement des agences pour être plus efficace et plus rentable. Bien au contraire. Le nombre n’a fait qu’augmenter ces dernières années. De 37 agences déjà en 2015, 2016 et 2017, on est passé à 76 agences en 2018 et 2019 pour en arriver à 128 en 2022 et 2023. « C’est comme du commerce. On ne peut pas empêcher les gens d’ouvrir des agences, pour peu qu’ils s’engagent à respecter le cahier de charges y relatif », se défendent certains. Les chiffres sont loquaces : sur les 128 agences engagées sur l’édition 2022, au moins 50 n’ont pas eu 10 pèlerins. Et c’est parti pour recommencer.
Ces agences sont soumises au régime fiscal RSI, avec des travailleurs déclarés à la caisse, des loyers à honorer, alors que beaucoup d’entre elles ont passé deux années sans travailler, à cause de la crise de Covid-19…. Dont elles trainent encore les séquelles, car aucune d’elles n’a bénéficié d’un kopeck du fonds ayant été servi aux entreprises pour supporter les effets de cette crise.
Moumouni SIMPORE
Encadré
Evolution du tarif Hadj
au Burkina
1998… ………………….. 946.000 F
1999…………….………. 976.800 F
2000…………………… 1.017.900 F
2001…………………… 1.138.500 F
2002…………………….1.183.175 F
2003………………………1.340.000 F
2004…………………….. 1.355.000 F
2005……………………… 1.340.000 F
2006………………………1.490.000 F
2007………………………1.430.000 F
2008………………………2.090.000 F
2009………………………2.195.000 F
2010………………….…….935.000 F
2011………………………1.885.000 F
2012……………………….1.810.000 F
2013………………..…….1.810.000 F
2014………………………1.810.000 F
2015………………………2.150.000 F
2016………………………2.201.070 F
2017……………………….2.171.720 F
2018……..…………….…… 2.28.000 F
2019……………….……… 2.132.000 F
2020…2021………………SANS HADJ
2022……..…………..…… 3.047.000 F
2023………………..…….3.593.000 F
Encadré 2
Quid du pèlerinage catholique ?
C’est la fraternité des promoteurs des pèlerinages catholiques du Burkina Faso qui est en charge de l’organisation et de la mise en œuvre des pèlerinages. Constituées de 7 agences et associations, elle a présenté le programme d’activités pour 2023, le 10 avril dernier.
Israël, Jérusalem, France, Italie, Canada, Medjugorje en Bosnie-Herzégovine sont autant de destinations pour les pèlerinages catholiques de l’année 2023.
Les dates et les coûts sont aussi connus :
-Israël, en « Terre sainte », du 11 au 21 juillet 2023 à 1.850.000 francs CFA ;
-Jérusalem, en « Terre sainte », du 18 au 30 juin 2023 et du 17 au 29 juillet 2023 à 1.859.000 francs CFA ;
-Italie, du 12 au 25 août 2023 à 1.950.000 francs CFA ;
-Canada, du 10 au 30 septembre 2023 à 3.000.000 francs CFA ;
-Medjugorje, en Bosnie-Herzégovine, du 15 au 30 octobre 2023, à 1.950.000 francs CFA ; -Côte d’Ivoire, du 9 au 19 août 2023, à 225.000 francs CFA par la route et 700.000 par les airs ;
-Ouaga, Bouaké, Yamoussoukro, Issia, Abidjan, du 9 au 19 août 2023, à 230.000 FCFA (voie terrestre) ;
-Bouaké, Yamoussoukro, Issia, Abidjan du 9 au 17 août 2023 et à 225.000 par la voie terrestre et 700.000 par voie aérienne.
Les agences de voyage qui s’occuperont de ces pèlerinages catholiques sont : le Groupe Sainte Philomène, le Groupe d’accueil de Jésus, Fraternité Sainte famille de Bobo-Dioulasso, l’agence Pacific Tour, l’agence Sainte Rita voyage et l’agence Keysia’s Travel.
Selon la Secrétaire permanente de la Fraternité des promoteurs des pèlerinages catholiques du Burkina Faso (FPC), Sévérine Traoré, pour chaque destination, les places sont limitées à 50 pèlerins. Les prix cités prennent en compte l’hébergement, la restauration et les déplacements.
Encadré 3
Les rites du Hadj
La sacralisation : le pèlerin porte l’« ihram », soit un châle et un pagne de coton, blanc comme un linceul, non cousu ; la femme, elle, revêt une ample robe et sur la tête un châle cachant les cheveux mais laissant voir pleinement le visage. Pendant toute la durée du Hadj, soit cinq jours, le pèlerin doit respecter nombre d’interdits : ne pas se couper les cheveux ou les ongles, s’abstenir de rapports sexuels, ne pas tuer d’animaux …. Le Hadj, s’il commence et s’achève à la Mecque même, se déroule, pour l’essentiel, loin en dehors de la ville sainte, dans la plaine désertique d’Arafat puis dans le ravin rocailleux de Mina, situés à 25 km et 8 km de la Kaâba.
La circumambulation : en arrivant à la Mecque, le pèlerin se rend devant la Kaâba, il en fait sept fois le tour dans le sens inverse des aiguilles d’une montre, histoire de remonter le temps jusqu’au premier matin de l’univers habité.
La course : il doit ensuite courir entre deux buts, Safâ et Marwa, sis non loin de la Kaâba et distants de 400 mètres l’un de l’autre. Il faut faire quatre fois l’aller et trois fois le retour en souvenir d’Agar, concubine d’Abraham et mère d’Ismaël, le père « biblique » des Arabes, égarée dans le désert, affolée, sur le point de mourir de soif, et qui aurait couru entre ces deux éminences rocheuses avant de trouver le puits sacré de Zemzem.
La station d’Arafat : le 9e jour du mois de Dhu El-Hidja, le douzième du calendrier lunaire islamique, la foule se met en route en direction du mont Arafat, situé à une vingtaine de kilomètres de la Mecque. D’après la tradition, c’est au sommet du mont Arafat qu’Adam et Eve, chassés du paradis, se sont retrouvés et reconnus, d’où son nom signifiant le « Mont de la Reconnaissance ». Le pèlerin s’y tient debout, recueilli, au milieu d’un océan de croyants de tous pays, de midi au coucher du soleil.
La lapidation des trois stèles de Satan et le sacrifice : sur le trajet du retour, à Muzdalifa, le pèlerin fait provision de petits cailloux qui serviront, le lendemain, pour la lapidation des stèles sataniques. Ce rite est effectué en mémoire de la « résistance » d’Abraham, face à Satan qui par trois fois, chercha à le faire désobéir à Dieu, lequel lui avait ordonné de sacrifier son fils Ismaël ; les trois fois, Abraham répondit au tentateur en le chassant à coups de pierres. Après la cérémonie de la lapidation, à Mina, vient le moment du sacrifice d’un animal, brebis ou chèvres, là aussi en souvenir du sacrifice d’Abraham, qui faillit y immoler Ismaël. De nos jours, en fait de sacrifice, le pèlerin s’acquitte d’un « bon de sacrifice » valant le prix d’un mouton et le remet aux autorités du Hadj. Celles-ci feront procéder, dans un abattoir ultra moderne sis non loin de Mina, à un abattage avant de congeler la viande pour l’envoyer finalement aux pauvres de tous pays.
La circumambulation : le pèlerinage se termine par une ultime circumambulation autour de la Kaâba, prélude au retour en terre profane, chacun doté désormais de l’enviable titre de « Hadji », le « Pèlerin ».o
Source : Slimane Zeghidour ; TV5 monde