• Eligible depuis 2004
• Les exportations restent faibles
• Un marché inaccessible à cause des règles
Les Etats-Unis ne badinent pas avec le respect des règles démocratiques. Après avoir exclu le Burkina Faso du MCA, suite au coup d’Etat du 24 janvier 2022, une nouvelle sanction vient de tomber : le président américain, Joe Biden, à travers une lettre adressée à la Chambre des représentants et au Sénat, a décidé de retirer le Burkina Faso de la liste des pays bénéficiaires de l’African Growth and Opportunity Act (AGOA). Cette mesure prendra effet dès le 1er janvier 2023.
En juin dernier, suite au coup d’Etat du 24 janvier 2022, perpétré par Paul Henri Sandaogo Damiba , et qui a emporté le président démocratiquement élu, Roch Marc Christian Kaboré, le gouvernement américain avait mis un coup d’arrêt sur le deuxième programme de développement, le Millenium Challenge Corporation (MCC). Ce second Compact était doté d’une enveloppe de 450 millions de dollars et devait changer le visage du secteur de l’énergie, à terme, avec pour objectifs, entre autres : la réduction du coût du service de l’électricité et l’accroissement de l’offre.
Comme pour le retrait du MCA, les arguments américains restent constants, trois mois après : peu de « progrès continu vers l’établissement et la protection de l’État de droit et du pluralisme politique». Le pays ne remplit donc plus « les conditions d’éligibilité de l’article 104 de l’AGOA ». Chaque auteur de coup d’Etat endosse une sanction américaine. Cette seconde sanction tombe un mois après le putsch du 30 septembre 2022, du Capitaine Ibrahim Traoré.
Les produits burkinabè ne bénéficieront donc plus des franchises mises en place par les États-Unis pour faciliter le commerce avec les nations africaines, dans le cadre de l’AGOA. Quels sont les produits concernés et quel pourrait être l’impact de cette mesure sur l’économie nationale ?
Sur la liste des produits admissibles sur le marché américain (voir encadré), le Burkina n’excelle que sur les produits dérivés de l’amande de karité ; c’est-à-dire, le beurre et les produits cosmétiques dérivés du beurre de l’amande de karité. Un produit comme le soja, dont la production prend de l’envergure, est également sur les tablettes des exportateurs.
L’amande de l’anacarde est également exportée par certaines unités de transformation vers les Etats-Unis, mais pas en grande quantité, relativise Eloi Nombré, membre d’une organisation de producteurs. Cependant, les produits de l’artisanat sortent du lot, selon nos sources. De façon générale, les statistiques officielles disponibles traduisent la faiblesse des échanges, même si le manque à gagner va impacter la vie de certains producteurs et exportateurs. Ce manque à gagner est difficile à évaluer. En 2016, le volume des échanges était estimé à 3,6 millions de dollars, selon une note gouvernementale, « dont une infime partie sous le régime d’accès préférentiel de l’AGOA ». Un chiffre qui démontre clairement que le pays des Hommes intègres n’a pas suffisamment profité de l’AGOA. Les statistiques les plus récentes du ministère du Commerce font état d’une progression des montants des échanges entre 2018 et 2019. En effet, les exportations du Burkina Faso vers les Etats-Unis d’Amérique, sous AGOA, ont progressé de 487,85 millions FCFA et de 1.501,5 millions FCFA. Ce chiffre, selon un exportateur vers les Etats-Unis, est loin de la réalité.
L’ambition du Burkina était d’augmenter le volume de ses échanges dans le cadre de l’AGOA. C’est ainsi qu’en 10 juin 2021, , le gouvernement du Burkina Faso a élaboré un plan stratégique d’exportation sous AGOA (PS-AGOA) couvrant la période 2021-2025, en vue de prendre en compte les nouvelles exigences de l’accord. Malgré cela, la percée des produits burkinabè n’est pas encore une réalité. Le marché américain reste « difficilement accessible à nos produits », en raison de la règlementation jugée contraignante par Paul Ouédraogo, producteur de mangue. L’AGOA est un accord en vigueur depuis 2000, et le Burkina Faso a été désigné pays éligible, le 10 décembre 2004, et cette éligibilité courait jusqu’en 2025. L’accord vise à réguler et à faciliter les échanges commerciaux entre les États-Unis et l’Afrique. Les pays éligibles jouissent d’un programme de préférences commerciales, dont une réduction de taxes sur certains produits qu’ils exportent vers les États-Unis. Mais en contrepartie, ces produits, pour accéder au marché américain, devraient respecter un certain nombre de normes sanitaires et de qualité. Depuis 2016, le Burkina travaille avec les acteurs privés intéressés à renforcer leurs capacités, afin de profiter de cette opportunité.
Le renforcement des capacités a concerné des aspects comme la documentation à l’export, les exigences sanitaires, l’emballage des produits et l’étiquetage, etc. En plus du Burkina Faso, la Guinée et le Mali sont également frappés de suspension pour les mêmes causes .Tous de l’Afrique de l’Ouest, en proie à une instabilité politique et à l’insécurité.o
FW
Encadré
Pays membres : exit Burkina Faso ; Guinéé et Mali
E n plus du Burkina Faso, la Guinée et le Mali sont également frappés de suspension pour les mêmes causes. Trois pays de l’Afrique de l’Ouest. Dans la zone ouest-africaine, le Ghana et la Côte d’Ivoire.
Encadré 2
Liste des produits éligibles pour l’obtention du visa AGOA
Accès au marché des États-Unis en franchise de droits et de contingents pour les produits
éligibles suivants :
– Coton ;
-Produits animaux (bétail sur pieds, viande, cuir et peaux) ;
– Produits oléagineux (sésame, arachide, noix et beurre de karité, noix de cajou) ;
– Produits de l’horticulture (mangue, oignon) ;
– Céréales ;
– Produits miniers ;
– Produits artisanaux ;
– Produits du textile et des vêtements.o