• La Loi de finances initiale 2022 a injecté 100 milliards FCFA
• Des montants conséquents depuis 2015
• Les attaques terroristes augmentent
Les militaires ont toujours avancé le manque de logistique adéquat pour venir à bout de l’hydre terroriste. Ils citent souvent un besoin en hélicoptères, drones, chars, armes, etc.). Or, des millions FCFA conséquents ont toujours été injectés dans les secteurs de la défense-sécurité (graphique 1). Cette situation a été qualifiée de paradoxe sécuritaire par le Centre d’information, de formation et d’études sur le budget (CIFOEB) et Oxford Policy management. Ces deux structures ont publié, en juillet 2022, un rapport dénommé « Aperçu analytique de l’économie et des finances publiques du Burkina Faso ». Les rédacteurs du rapport se sont attardés sur la Loi de finances initiale (LFI) ajustée de 2022. En rappel, celle-ci a été revisitée par le gouvernement de transition du Lieutenant-Colonel Paul Henri Damiba, arrivé au pouvoir le 24 janvier 2022. Cette loi de finances initiale tient compte du fait que la lutte contre l’insécurité constitue la principale priorité de la Transition telle que déclinée dans son plan d’actions (figure 6).
Défense-sécurité : de 10 à 11% du budget global
C’est ainsi que le gouvernement a pris des décrets d’avance de crédits. Sur cette base, le CIFOEB dit avoir établi qu’environ 100 milliards FCFA de crédits ont été orientés vers la lutte contre l’insécurité, en faisant passer, par exemple, le budget de la défense de 10 à 11% du budget global de l’État. Toutefois, le CIFOEB dit constater que l’augmentation des dotations budgétaires de la sécurité -défense ne rime pas avec une amélioration de la sécurité. Partant de ce constat, le CIFOEB n’a pas hésité à le qualifier de paradoxe sécuritaire. Ce paradoxe sécuritaire provient plus d’une inefficacité allocative des crédits budgétaires à l’intérieur des ministères en charge de la sécurité-défense.
Le Burkina Faso, pays le plus touché du G5 Sahel
Comme argument avancé par le CIFOEB, l’indice mondial du terrorisme classe le Burkina comme le pays le plus touché par le terrorisme dans le G5 Sahel, selon le dernier rapport de l’Institut de l’économie et de la paix (IEP). Le rapport révèle que tout porte à croire que l’essentiel des crédits est alloué à des dépenses qui n’ont pas un véritable lien avec la sécurité et la défense du territoire, telles que les dépenses de pilotage ou de fonctionnement. Autrement, il n’y a pas un chemin d’impact clair entre les dépenses des ministères en charge de la sécurité-défense et l’amélioration de la situation sécuritaire. Sur cette incohérence entre dépenses militaires et efficacité de la lutte contre le terrorisme, une enquête de l’Institut d’études de sécurité (ISS) de Bamako, publiée en 2022, a révélé qu’en 100 jours (25 janvier et le 8 avril 2022) de présidence du chef de l’Etat, Paul Henri Damiba, le Burkina Faso avait connu 610 attaques terroristes qui ont tué 567 personnes.
Secteur agriculture : le budget est passé de 8.1% à 9.7%
Des crédits budgétaires supplémentaires ont été également alloués à l’agriculture, compte tenu de la crise alimentaire et nutritionnelle. Les dépenses communes interministérielles (DCIM), quant à elles, sont passées de 8.1% à 9.7% dans la LFI ajustée de 2022, du fait de la fusion de certains ministères qui diminue les charges de fonctionnement, et reversées au niveau des DCIM. Ces dépenses sont, entre autres, composées de charges communes de fonctionnement de l’Etat, de charges communes de transferts courants et de charges communes d’investissement et de transferts en capital.
Autres ministères 29.3% à 17.8%
La part des autres ministères et institutions a connu une baisse dans la LFI ajustée de 2022, en passant de 29.3% à 17.8%. Ces ministères et institutions comprennent, entre autres, les ministères de la Solidarité nationale et de l’Action humanitaire, du Genre et de la Famille, du Travail et de la Protection sociale, le Commerce, l’Environnement et du Changement climatique, les Affaires étrangères et de la Coopération, la Justice et les Droits humains, la Communication et la Culture, les Transports, la Transition digitale, etc. Globalement, les ajustements de la LFI 2022 n’ont pas modifié les budgets des secteurs sociaux.
Ces secteurs ont été préservés, et l’augmentation des dépenses au profit de la sécurité-défense provient surtout des secteurs de soutien à la production. Toutefois, si la crise sécuritaire perdure, les secteurs sociaux pourront être également touchés par cet effet d’éviction.o
Synthèse de Ambéternifa Crépin SOMDA
Encadré
Défi sanitaire persistant
Les ajustements du budget n’ont pas permis d’améliorer la part budgétaire de la santé, malgré l’enjeu sanitaire persistant. Or, l’indice de sécurité sanitaire mondial indique que le Burkina Faso ne dispose pas d’un système de santé robuste capable de faire face au défi sanitaire. o