• De la nécessité d’agir ensemble
• Le sens de la responsabilité
• Rassurer par l’exemple et l’action
La conduite de la Transition, interrompue par le coup d’Etat du 30 septembre 2022, a été débattue lors des Assises nationales, les 14 et 15 octobre. Comme il l’avait promis, lors de sa toute première déclaration, le chef de l’Etat, le Capitaine Ibrahim Traoré, a décidé que les concertations des forces vives de la Nation puissent dégager les pistes à même de conduire la Transition à terme dans une vision inclusive.
La tenue des Assises nationales pour adopter la Charte de la Transition, au-delà des interprétations que les uns et les autres en ont donné, a une fois de plus montré la nécessité pour les Burkinabè d’agir ensemble. Face à la crise multidimensionnelle que traverse le Burkina, exacerbée par le péril terroriste, le dialogue et la solidarité demeurent le rempart contre les abus et les erreurs. Ces concertations ont permis de faire le constat de la situation et de formuler des voies pour mieux l’appréhender dans toute sa dimension, afin de trouver le remède adéquat. Faut-il le rappeler, l’instabilité politique et institutionnelle dans laquelle est plongée la Nation est inhérente à l’insécurité grandissante.
Le Lieutenant-Colonel, Paul Henri Sandaogo Damiba, pour déposer le président démocratiquement élu, Roch Marc Christian Kaboré, le 24 janvier 2022, s’était appuyé sur la dégradation continue de la situation sécuritaire. A l’épreuve de l’exercice du pouvoir, la priorité du moment a été abandonnée au profit « d’aventures politiques malheureuses. » Las de voir la donne changer, les frères d’armes de Damiba, qui l’avaient aidé à prendre le pouvoir, ont rectifié le tir en le poussant à la sortie. Faisant le constat alarmant de l’ampleur du péril sécuritaire, le Capitaine Ibrahim Traoré a fait la promesse d’y apporter la réponse adéquate.
Les Assises nationales ont particulièrement accordé une attention à cette priorité. Le Burkina doit impérativement mettre fin aux agissements criminels des forces obscurantistes qui déversent leur trop-plein de haine sur de pauvres populations qui ne demandent qu’à vivre dans la tranquillité. Les déplacés internes, qui errent sur leurs propres territoires, doivent regagner leurs localités d’origine. Des milliers d’élèves dont la scolarité est prise en otage doivent retrouver le chemin des classes. C’est dire que l’urgence de parer à la situation a été unanimement recommandée.
Un constat qui interpelle toutes les composantes sociales à s’investir résolument dans la lutte contre le terrorisme. Pour l’atteinte des missions de la Transition mentionnées dans l’avant-projet de la Charte, qui consistent à rétablir et renforcer la sécurité sur l’ensemble du territoire national, apporter une réponse urgente, efficace et efficiente à la crise humanitaire, promouvoir la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption, engager des réformes politiques, administratives et institutionnelles en vue de renforcer la culture démocratique et consolider l’Etat de droit, œuvrer à la réconciliation nationale et à la cohésion sociale et assurer l’organisation d’élections libres, transparentes et inclusives, il va falloir que chaque partie y mette du sien avec à l’esprit l’amour de la patrie.
Dans cette parenthèse d’incertitudes, il est de l’intérêt de tous de faire preuve d’un sens de la responsabilité pour sauver la Nation en péril. Tant que la prévalence des intérêts de chapelles et d’individus motivera les agissements des uns et des autres, le Burkina ne saurait s’extirper du bourbier dans lequel il est empêtré depuis sept ans. Il est temps que tous, à commencer par la classe politique, comprenne l’impératif de voir, avant tout, le Burkina. Il est attendu de chacun qu’il taise son ego destructeur, le temps que l’accalmie revienne. Sans ce minimum de sursaut patriotique, les bonnes intentions exprimées ici et là ne porteront guère la promesse des fruits. L’armée, dans toutes ses composantes, devrait également réhabiliter son caractère républicain en s’émancipant des officines politiques. En cette période charnière chahutée de l’histoire du pays, il est temps que chacun s’interroge sur ce qu’il peut-faire dans le sens de l’intérêt général. « Nous devons puiser dans nos tréfonds pour créer les conditions de la renaissance de notre chère patrie. Sachons briser le cercle vicieux de la division, de la perversion religieuse, de la stigmatisation et du repli et mettons en pratique un cercle vertueux de l’inclusion de tous, de la concertation, de l’acceptation des différences et des règles de la construction de l’Etat Nation pour dépasser la conjoncture actuelle », a suggéré l’enseignant-chercheur, Dr Serge Noël Ouédraogo.
La Charte de la Transition étant adoptée, il est attendu de ceux qui seront choisis pour animer les différents organes y relatifs, qu’ils prêchent par l’exemplarité. Tant que l’autorité ne saura pas incarner les idéaux de probité et du devoir, il serait chimérique de prétendre à des résultats probants. Le manque de leadership a toujours été le maillon faible de la gouvernance sous nos latitudes.o
Jérôme HAYIMI
Encadré
Tracer les sillons d’un renouveau rassembleur
Quand c’est au détour d’un atelier ou d’une réunion que l’autorité va dicter la conduite à tenir, tant que ses actes seront en déphasage avec les principes qu’il édicte, l’on ne fera que tourner en rond comme une toupie. Celui ou celle qui devra prendre les rênes du pays, civil ou militaire, devrait donner de lui l’image d’un patriote qui voudrait sortir le pays de ce tâtonnement cyclique. Il devra montrer aux Burkinabè qu’il a été choisi pour servir avec dignité le pays.
Civil ou militaire, le président de la Transition doit être aux prises avec les enjeux du moment, en prenant des décisions dont la résonnance se fera sentir sur le terrain. Dans un contexte exceptionnel, il serait intéressant d’envisager des mesures fortes et exceptionnelles. Le prochain chef de l’Etat devra se montrer digne de la responsabilité à lui confiée. Il devra se démarquer de l’inclinaison à succomber aux sirènes de chapelles qui lui témoigneront sympathie et soutien.
Le dirigeant de la Transition devra faire preuve d’humilité en étant à l’écoute des préoccupations de ses concitoyens. Enfin, il devra redonner espoir à ces millions de Burkinabè qui ne se sentent plus en sécurité chez eux et tracer les sillons d’un renouveau rassembleur.o