Le Collectif des Syndicats de l’Aéronautique Civile a adrésssé une lettre ouverte à l’ambassadeur de France au Burkina Faso intitulée « Lettre ouverte relative à votre intrusion dans le dossier de concession de l’aéroport international Ouagadougou – Donsin »
A
« Excellence M. l’Ambassadeur de France auprès du Burkina Faso
Excellence
Pour mémoire, le projet de privatisation de l’Aéroport International de Ouagadougou remonte à décembre 1997. Dans le processus, les syndicats de l’aéronautique civile ont toujours joué leur partition en s’opposant farouchement au bradage de ce patrimoine national tout en s’inscrivant dans la préservation des intérêts aussi bien des droits et avantages acquis des travailleurs dudit secteur que du peuple burkinabè. Aussi, l’idée de déplacer l’aéroport actuel de Ouagadougou sur le site de Donsin est celle des partenaires sociaux qui, dans leur vision avant-gardiste l’avaient recommandée lors de d’un congrès tenu en novembre 1984.
Ce processus de construction ayant connu des fortunes diverses, force est de constater que le 12 octobre 2021, en catimini et sans l’onction de l’auguste Assemblée Nationale burkinabè, une convention de concession pour la construction et la gestion de l’aéroport International de Ouagadougou Donsin a été signée au mépris des intérêts des travailleurs, entre l’Etat burkinabè et le consortium Meridian-AMP, une entreprise de droit français.
Il sied de rappeler que cette signature intervenait suite à l’autorisation donnée par le Conseil des ministres en sa séance ordinaire du 30 juillet 2021 par le gouvernement d’antan.
Excellence, grande fut notre surprise de constater votre ballet diplomatique auprès des institutions de la République pour exprimer votre gratitude à qui de droit. Il nous semble qu’un diplomate de votre trempe, malgré son attachement indéfectible et légitime à la défense des intérêts de son pays et de ses entreprises, ne devrait pas s’immiscer avec autant de détermination.
Excellence, vous voudrez bien noter que la convention lie une entreprise privée de droit français à l’Etat burkinabè, et de ce fait, nous pensons que vous n’êtes pas dans votre rôle quand vous faites l’amalgame entre l’Etat français et une entreprise privée de droit français. Nous en voulons pour preuve, votre récente rencontre avec les premières autorités en charge du dossier juste après le passage des premiers responsables de Meridian-AMP.
Excellence, cet activisme débordant inquiète très sérieusement les partenaires sociaux ; parce qu’il serait logique de parier que derrière ces tentatives de séduction se cachent des menaces et des intimidations voilées à l’encontre de l’Etat souverain du Burkina Faso, à l’image des pratiques de la France-Afrique.
Avec le changement de régime intervenu le 24 Janvier 2022 ainsi que la nouvelle dynamique qui s’en est suivie, les nouvelles autorités du Burkina Faso semblent disposées à annuler ce contrat qui renferme beaucoup d’insuffisances. En vous ingérant ouvertement dans ce dossier, il n’y a l’ombre d’aucun doute sur votre détermination, de par votre position, à influencer nos autorités politiques afin d’obtenir la validation de ce contrat, qui mérite absolument d’être dénoncé. Dans ce fameux contrat avec Meridiam AMP, aucune disposition ne garantit la dotation en ressources financières suffisantes et pérennes des structures régaliennes pour jouer leurs rôles de supervision de la sécurité et la sureté aérienne. Lorsque naitront des manquements graves à cette supervision, il est fort à parier que la France n’hésitera pas à maitre le Burkina Faso sur la liste noire. Cependant, nous fondons l’immense espoir que les nouvelles autorités prendront la pleine mesure de la gravité de cette situation et réagiront conséquemment.
Excellence, à notre humble avis, vous devriez vous cantonner dans votre rôle de représentant de l’Etat français au Burkina Faso au lieu de vous ingérer dans une affaire purement commerciale engageant la souveraineté du Burkina Faso, et dont les enjeux sont énormes pour notre peuple. Etant donné que l’image de la France est déjà suffisamment écorchée dans nos pays, agissant de la sorte, vous ne rendez ni service à la France, ni à Meridian-AMP, encore moins au Burkina Faso.
En tout état de cause, le collectif des syndicats de l’aéronautique civile vous adresse cette lettre ouverte pour que vous vous ressaisissez et recadrez vos interventions et agissements au mieux des intérêts de nos deux peuples.
Le collectif des syndicats de l’aéronautique civile entend s’opposer vigoureusement au bradage du patrimoine de l’aviation civile, et ne ménagera aucun effort pour défendre les intérêts des vaillants travailleurs du secteur, en veillant à la préservation de leurs droits et avantages acquis.
Veuillez recevoir, Excellence M. l’Ambassadeur l’expression de nos meilleures salutations ».