Le coup d’Etat du 24 janvier 2022 est venu remettre en cause la tendance haussière des recettes internes que l’Etat collecte. La succession des évènements sécuritaires et les annonces de suspension des aides des pays amis après le 24 janvier 2022 ne sont pas de nature à placer le Burkina Faso dans un scénario optimiste.
Pour une source proche de l’administration fiscale, le peu d’argent qui est engrangé ces temps-ci est redéployé actuellement en priorité vers la défense et la sécurité. La situation économique du pays n’est pas reluisante et la menace de sanctions par la CEDEAO crispe les acteurs économiques et financiers.
Présentement, une révision budgétaire serait en cours sous le pilotage du ministère en charge des finances. Le constat des participants à cet exercice de révision du budget en cours provoque quelques vagues de mécontentements. Les responsables des crédits des ministères et institutions qui sortent de ces séances de révision ne cachent pas leur mécontentement. Ce sont des pans entiers des budgets des différents ministères et des institutions qui sont rognés si les lignes budgétaires ne sont pas complètement supprimées. Un minimum de budget est accordé aux ministères et institutions juste pour fonctionner. Mais la réalité est connue de tous. A défaut de ressources internes et externes, les dépenses prennent un coup, surtout les dépenses d’investissements.
Le gouvernement, dans sa recherche de solutions, serait tenté de lancer un appel à contributions volontaires pour soutenir l’effort de guerre.
Qui sont ceux qui vont se sacrifier
Cet appel vise à demander un effort particulier aux citoyens et aux entreprises burkinabè et non burkinabè à mettre la main dans la poche pour contribuer au financement de la guerre. Les avis au sein même des membres du gouvernement divergent sur la question, d’où le report du lancement de cet appel.
Dans un pays en proie à toutes ces difficultés dues au terrorisme, à la crise humanitaire et alimentaire, la générosité de ses fils ne devrait pas souffrir d’un débat. Mais le contexte actuel est différent et peu favorable.
Les Assises nationales de la Transition ont rejeté la proposition de gratuité des mandats des membres de l’organe législatif de transition. La proposition de gratuité pour ces membres devait préparer les esprits à un effort individuel et collectif pour soutenir cette lutte. Les membres de l’organe de transition auraient pu donner l’exemple en attendant que les membres des autres organes suivent le pas. Au cours des assises, certaines personnes qui ont fait preuve de violence verbale pour obtenir ces salaires se sont retrouvées dans l’organe législatif. Ils percevront un salaire de 12 mois mais travailleront moins. On conclut que leur objectif n’est pas de sauver le Faso mais de recevoir des rémunérations. Lequel des Burkinabè va donc se sacrifier pour que les 71 membres de l’organe législatif de transition se paient des salaires ?
Donner l’exemple
La Charte de la Transition a codifié un certain nombre de valeurs qui doivent guider les pas des autorités et des Burkinabè pendant et après cette Transition. Il s’agit de valeurs comme l’intégrité, l’exemplarité, le sacrifice, le mérite, le patriotisme, la transparence, l’amour du travail qui doivent être promues et valorisées au quotidien d’abord par les membres de l’Exécutif
Le Président Damiba et son gouvernement doivent donc donner l’exemple en rendant opérationnelles les valeurs de la Charte, à travers l’adoption d’un certain nombre de mesures et de comportements. Un ministre qui roule en V8 sous cette Transition n’est pas différent d’un ministre sous le Président Kaboré. Les Burkinabè attendent un signal fort en matière d’économie. Quel est le salaire et les autres avantages que le président de la Transition, son Premier ministre, les membres du gouvernement et les présidents d’institutions percevront-ils sous cette Transition ? Les autorités de la Transition seront-elles rémunérées sur la base du décret de 2008 en vigueur qui fixe les salaires des ministres à 1,150 millions FCFA ? A quels autres types d’avantages (eau, électricité, communication, carburant, santé, loyer, personnel de maison, etc. auront-ils droit ?
Une bonne dose de communication sur la rémunération des autorités sous la Transition aura un impact sur la mobilisation des Burkinabè autour de ceux qui luttent contre le terrorisme et ceux qui se battent pour le retour de l’administration publique et des personnes déplacées internes dans certaines localités.
L’exemplarité confèrera une grande légitimité au Président Damiba et à l’ensemble de son gouvernement pour lancer l’appel patriotique pour un sursaut national contre le terrorisme et la crise humanitaire.
Les Burkinabè attendent le signal fort de ces dirigeants. Qu’ils fassent preuve d’exemplarité afin de pouvoir mobiliser l’ensemble des composantes pour ne pas donner l’impression que le sacrifice est attendu seulement d’une catégorie de Burkinabè.
JB
Encadré
Le signal fort en matière d’exemplarité des autorités se fait toujours attendre
La question du mérite est également à opérationnaliser sous la Transition. Une personne dont la gestion a été décriée sous les régimes passés ne devrait pas prétendre à un poste, à plus forte raison être nommée sous cette Transition. Pendant que des personnes contestées sont nommées, les autorités de la Transition lancent des audits de gestion. Une politique de deux poids deux mesures qui ne rassure pas toujours.