A la UneSociété-Culture

Justice: quel sort pour les biens saisis ?

Quel sort pour les avoirs gelés, saisis ou confisqués en matière pénale au Burkina Faso ? Aucun, du reste pour le moment… ou plutôt une dépréciation de leur valeur au fil du temps. Le constat d’une gestion inadéquate des biens et avoirs illicites est la dépréciation de certains biens saisis à la suite d’enquêtes judiciaires pour des infractions dont les auteurs sont en attente de jugement.
C’est, notamment, le cas des biens périssables (poissons, récoltes, animaux, produits alimentaires), des biens de grande valeur (véhicules, immeubles, actions) des métaux précieux (or, diamant), etc. Il est évident qu’en perdant de sa valeur, tout bien devient moins bien pour l’Etat. A titre d’exemple, on constate que dans les parquets et commissariats, dix (10) vélos se vendent à moins de cinq mille (5.000) FCFA, une motocyclette à dix mille (10.000) FCFA ou encore une voiture à moins de cinquante mille (50.000) FCFA.
La perte de l’Etat ne s’arrête pas là. Il faut ajouter qu’en présence d’une décision de relaxe, d’acquittement, de restitution ou de non-lieu, la personne poursuivie est fondée à demander à l’Etat la restitution de son bien placé sous mains de Justice (cas affaire GUIRO). Ainsi, le Trésor public sera appelé à exécuter des décisions de Justice en faveur des prévenus relaxés en supportant la dépréciation de la valeur des biens, consécutive à une saisie gérée de façon inappropriée.
Pourtant, les organisations criminelles utilisent des méthodes de plus en plus sophistiquées, et il faut donc adopter des approches novatrices dans les politiques de lutte contre la criminalité. Le Réseau inter-agences en matière de recouvrement des avoirs pour l’Afrique de l’Ouest en abrégé ARINWA, a d’ailleurs procédé à une révision de sa politique criminelle afin de minimiser leurs effets sur les économies nationales.
Non seulement la politique criminelle doit s’orienter vers la recherche de la condamnation à la prison de l’auteur des faits, mais aussi entreprendre des actions de ciblage des produits générés par les activités illicites qui permettent aux autorités compétentes de s’attaquer aux groupes criminels pour les frapper au cœur même de ce qui les motive dans leurs activités. Ainsi, les mesures telles que les confiscations des biens issus de l’activité criminelle et les fortes amendes doivent être peaufinées et allégées dans leur mise en œuvre, en vue de déposséder les délinquants du gain issu desdites activités. La création de structures pouvant gérer ces biens est donc encouragée.
Le Burkina Faso, partie prenante de ARINWA, semble se hâter lentement. Depuis 2019, on attend du Conseil des ministres l’adoption du décret portant création et de celui portant approbation des statuts de la structure nationale en charge de la gestion et du recouvrement des avoirs saisis ou confisqués : Agence nationale de gestion et de recouvrement des avoirs saisis ou confisqués, en abrégé ANAGRASC. C’est en 2018 que le ministère de la Justice a entamé le processus de création de l’ANAGRASC. Pour ce faire, conformément au décret N°2014-609/PRES/PM/MEF/MFPTSS du 24 juillet 2014 portant conditions et modalités de création, de gestion et de suppression des établissements publics de l’Etat, l’ensemble des textes régissant la création d’un établissement public de l’Etat a été élaboré, examiné en Conseil de cabinet puis validé au cours d’un atelier tenu à Ouagadougou les 19 et 20 juillet 2018. Ce sont, notamment : l’étude organisationnelle, économique et financière, laquelle a conclu en la viabilité de l’agence une fois créée ; le projet de statut de l’ANAGRASC; le projet de décret portant création de l’ANAGRASC, le projet de décret portant approbation des statuts de l’ANAGRASC.
Le Comité technique interministériel s’est retrouvé en octobre 2019, pour examiner les projets de textes avant la saisine du Conseil des ministres par les soins du ministre en charge des finances (conformément à l’article 10 du décret portant conditions et modalités de création, de gestion et de suppression des établissements publics de l’Etat). Après cette rencontre, le dossier devrait être subordonné à la décision du ministre de l’Economie et des Finances, après avis de la Commission. Depuis lors, silence radio.o
Martin SAMA

Commentaires

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Bouton retour en haut de la page