C’était dans la soirée du 03 novembre 2021, à Ouagadougou, qu’Oxfam et ses partenaires ont procédé au lancement du rapport sur les inégalités. Il portait sur la crise des inégalités en Afrique de l’Ouest et la lutte contre l’austérité et la pandémie. Classé 60e au niveau mondial et 5e en zone CEDEAO + (NDLR : parmi les 15 pays de la CEDEAO + Mauritanie), le Burkina Faso a un niveau d’égalité moyen, selon le rapport d’Oxfam. Au Burkina Faso, l’inégalité a nettement baissé depuis les années 90. Pourtant, 20% des plus aisés détiennent 44% des revenus, et dans les zones rurales, 47,5% de la population vit en situation de pauvreté. Selon les études du FMI, un tel niveau d’inégalité réduit la croissance PNB de quelques points %.
Cette révélation été faite lors du lancement dudit rapport intitulé « La crise des inégalités en Afrique de l’Ouest : lutter contre l’austérité et la pandémie », le 03 novembre dernier à la salle Henri Zongo au Centre national de presse Norbert Zongo. La cérémonie, qui a été conjointement organisée avec le Centre d’étude, de recherche et de formation en finances appliquées, la Direction générale des Impôts et l’ONG Oxfam, a permis aux participants de s’imprégner de l’indice d’engagement pour la réduction des inégalités au Burkina Faso, dans six domaines dont voici les grands traits :
Lutter contre les inégalités pendant la COVID
La réponse du gouvernement a été relativement efficace, avec une fermeture rapide des frontières du pays, et un faible nombre de cas du virus et de décès. Des dépenses additionnelles ont permis l’accès aux tests et aux traitements gratuits pour tous les citoyens, et une protection sociale pour l’alimentation.
Services publics
La part du budget allouée à l’éducation est plus élevée en zone CEDEAO (et 9e au niveau mondial) et représente 22,9%. Elle est supérieure à l’objectif mondial de 20%, et a augmenté récemment. Mais moins de 1% des enfants les plus pauvres terminaient leurs études secondaires en 2010.
Fiscalité
Dans la zone CEDEAO, le Burkina Faso a le plus haut taux de collecte des recettes fiscales. Néanmoins, ce taux est beaucoup moins élevé pour les impôts sur les revenus des entreprises (22%) et des individus (12%) que la TVA (72%), grâce aux exonérations accordées aux grandes entreprises étrangères et aux déductions réclamées par les classes riches.
Politique du travail
L’inégalité des salaires est la 15e plus élevée au monde, du fait que 87% de la population ne bénéficie pas du salaire minimum garanti (SMIG).
L’agriculture
La part de l’agriculture dans le PIB du pays est passée de 25% en 2000 à 20% en 2019. Pourtant, ce secteur employait 27% de la population en 2017, la pauvreté persiste principalement dans les zones rurales, et 10% de la population est confrontée à l’insécurité alimentaire.
La dette et les institutions de Bretton Woods
Avant la COVID, le fardeau de la dette était jugé « modéré » par le FMI et la Banque mondiale, mais le ratio dette/PIB a maintenant bondi de 6,6% pour atteindre un nouveau pic de 49,6%.
Au regard de ce qui précède, M. Issiaka Ouandaogo, Responsable de l’unité d’influence d’Oxfam Burkina, déclare qu’ « il faut reconnaitre que des efforts sont faits au Burkina pour la réduction des inégalités, ce qui est encourageant comme bonne nouvelle, mais il faut davantage des efforts pour arriver à bout des inégalités»
Sur la base des indices d’inégalités décrits, des recommandations ont été formulées dans le rapport à l’endroit des politiques du Burkina, afin de diminuer davantage l’inégalité. Ces recommandations préconisent l’accroissement des dépenses liées à l’éducation et à la santé, davantage de collecte des impôts et le respect des droits des travailleurs.
C’est fort conscient de cela que M. Omer Kaboré, Directeur pays de l’ONG Oxfam Burkina, a laissé entendre que « pour mieux faire face aux inégalités, il faut mobiliser davantage de ressources, revoir peut-être le niveau de fiscalité pour que ceux qui doivent payer et qui peuvent payer plus puissent être revus à la hausse. En tous les cas, nous pensons qu’il y a du potentiel et c’est aussi l’occasion d’interpeller, car nous sommes tous concernés pour ce qui est du civisme fiscal, puisqu’il est autant bien pour les grands que pour les petits. Je crois que si tout le monde met la main dans la poche pour contribuer au civisme fiscal, il y aura assez de ressources qui vont permettre de faire face aux engagements mais aussi de continuer à assurer les investissements nécessaires pour que justement, les personnes les plus vulnérables ne soient pas toujours les plus affectées. Il y a aussi, naturellement, l’allègement de la dette et son effacement qui est tout à fait nécessaire et ce sont les pays les plus nantis qui doivent faire des efforts à ce niveau. Vous savez que le Burkina est confronté à un climat particulier, pas seulement le domaine sécuritaire, mais également, le phénomène de changement climatique qui affecte beaucoup de personnes. Il y a énormément de défis à relever et pour lesquels une solidarité internationale est aussi nécessaire ».
Au cours de cette rencontre, trois justiciers du Sahel de la lutte contre les inégalités ont été présentés à la presse nationale. Il s’agit de Cynthia Valéa, journaliste juridique, de Malika Ouattara alias Slamazone, artiste slameuse, et d’Issiaka Ouédraogo, volontaire Oxfam au Burkina Faso.
Ce rapport sur l’indice de réduction des inégalités servira peut-être de boussole à nos politiques pour œuvrer au bien-être des populations. o
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