On rencontre généralement 03 manières de blanchir l’argent du crime. Par le placement d’argent sale dans les institutions bancaires et dans le système de la microfinance, par l’investissement de cet argent dans différents secteurs comme l’immobilier et par l’achat de bons trésors ou d’actions dans une entreprise légitime constituée. Ces informations ont été portées à la connaissance des journalistes participants à « l’atelier régional de formation sur le journalisme d’investigation sur les crimes économiques et financiers », qui s’est tenu du 26 au 28 novembre 2019 à Monrovia, au Liberia. Cette formation a été organisée par le Groupe intergouvernemental d’action contre le blanchiment d’argent en Afrique de l’Ouest (GIABA), institution spécialisée de la CEDEAO dont la mission est de protéger les économies des pays membres contre le blanchiment d’argent du crime.
Les auteurs du blanchiment de capitaux et financement du terrorisme sont souvent bien connus dans les pays en tant qu’investisseurs, hommes d’affaires ou experts très respectés et non pas comme des criminels. Ils agissent généralement en réseau dans lequel plusieurs personnes sont liées et commettent des crimes en utilisant des techniques sophistiquées, selon Timothy Melaye, gestionnaire du Centre d’information du GIABA.
La lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme est une activité complexe.
Une personne bien connue dans un pays africain a organisé un trafic de drogue à partir de la Colombie vers l’Europe. Ce trafic est passé par une compagnie aérienne et une compagnie maritime qu’il a créées, avec la complicité de ses transitaires et de fonctionnaires publics. L’argent issu de ce trafic est ensuite réinvesti dans l’achat d’actions dans de sociétés.
La lutte contre ce fléau n’est pas une chose aisée. L’Afrique de l’Ouest compte beaucoup sur les médias pour la dénonciation des cas avérés. Mais pour que les médias réalisent cette attente, il est judicieux que leurs capacités soient renforcées et qu’ils soient dotés d’outils pratiques pertinents, a reconnu le représentant du Directeur général du GIABA.
Cette formation a été bien appréciée par le représentant du ministre de la Communication du Liberia pour qui, les pays comptent sur les journalistes pour accroître la sensibilisation et exposer les crimes. Mais ce travail, selon lui, prend du temps, de l’argent, du courage et requiert plus de professionnalisme.
Pour comprendre le cadre mondial de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, l’expérience du GAFI a été présentée par Devante Alibo, chargé de Programme au secrétariat du GIABA. Créé au cours du Sommet du G7 à Paris en 1989, pour lutter contre la drogue qui génère des milliards de dollars, le GAFI vise à éviter que cet argent soit injecté dans le système financier. En 1996, son champ d’action a été étendu à 21 crimes sous-jacents et la lutte contre le terrorisme a été inclue en 2001. Le GIABA utilise les normes du GAFI pour mieux comprendre le cadre de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme dans un pays.
Le GAFI dispose de 40 recommandations qui fixent des normes. Chaque pays membre subit une évaluation indépendante des risques pour savoir où il en est avec la lutte. Parmi ces recommandations, l’existence et la mise en œuvre d’une loi sur le blanchiment des capitaux dans le pays. Qu’entend-on par blanchiment d’argent et de financement de terrorisme ?
Lasssiné Fofana, journaliste ivoirien et Rédacteur en chef de la Radiotélévision ivoirienne (RTI), a indiqué que le blanchiment d’argent visait à retraiter l’argent des produits d’origine du crime. Cela passe par la conversion ou le transfert du produit issu du crime, la dissimulation, le déguisement de la nature, de l’origine du produit, l’acquisition, la détention ou l’utilisation de ce produit.
Le blanchiment d’argent passe par des infractions sous-jacentes comme la participation à un groupe criminel organisé ou à un racket, le terrorisme et son financement, le trafic illicite d’arme, la corruption et la concussion, le vol, le délit d’initié et la manipulation de marchés publics, l’extorsion, etc. Lorsque l’argent mal acquis fait l’objet d’un placement, on parle de blanchiment d’argent.
Les méthodes de blanchiment d’argent divergent. Elles passent par les sociétés prête-noms, la déclaration de faux gains au jeu, l’écoulement de faux billets. D’autres méthodes de blanchiment d’argent existent, comme la sous-déclaration de la valeur d’un bien acheté afin de dissimuler le pouvoir d’achat de l’acheteur, l’utilisation abusive des systèmes alternatifs pour acquérir un bien qui dépasse le revenu de la personne, etc.
Elie KABORE
Journalisme d’investigation: de l’empirisme mais aussi de l’éthique
Dr Bisi Olawuyi, professeur à l’Université d’Ibadan au Nigeria, qui a présenté les méthodes et les stratégies en matière de journalisme d’investigation en fonction des particularités nationales, a rappelé que le travail du journaliste d’investigation avait pour but de révéler au monde ce qui est caché. Cette révélation doit se faire sur la base de faits et de chiffres acquis par des moyens légitimes. Les chiffres pouvant traduire un impact, il est indispensable pour le journaliste de disposer de compétences nécessaires.