Les industries extractives jouent un rôle important dans la croissance économique de l’Afrique. Selon la Commission économique pour l’Afrique (CEA), la dépendance de l’Afrique en minéraux a augmenté au cours des dernières décennies. En 2016, les activités minières représentaient 5 à 30% du Produit intérieur brut (PIB) de l’Afrique.
Les industries extractives couvrent les 03 dimensions des Objectifs de développement durable (ODD), à savoir la croissance économique, l’inclusion sociale et la protection de l’environnement. Plusieurs pays de l’Afrique ont engagé des réformes de la gouvernance de leur secteur extractif. Mais l’apport du secteur à l’économie des pays n’est pas suffisant. La principale raison est l’écart entre les dispositions légales et la mise en œuvre sur le terrain. Pourtant, la promotion des chaînes de valeur minérales régionales et des infrastructures intégrées dans le secteur minier pourrait contribuer à booster la croissance économique africaine. En plus, la Vision minière africaine (VMA), par exemple, qui repose sur l’importance primordiale de la pleine intégration des activités minières dans les autres secteurs de l’économie, n’est pas bien intégrée dans les textes nationaux. Comment réduire les écarts entre les textes nationaux et régionaux ?
La réponse à cette question nécessite un dialogue structuré, axé sur l’alignement et l’harmonisation des textes.
C’est pour répondre à cette préoccupation que s’est tenu le jeudi 7 novembre 2019 à Addis-Abeba, en Éthiopie, un dialogue politique sur le déficit de la mise en œuvre des réformes de la gouvernance des industries extractives en Afrique. Ce dialogue politique est organisé par la Section de la gestion des ressources naturelles, de la Division de la technologie, des changements climatiques et de la gestion des ressources naturelles de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), en collaboration avec l’Institut de gouvernance des ressources naturelles (NRGI).
Ce dialogue visait à renforcer la collaboration en vue de réduire le déficit dans la mise en œuvre des réformes légales et institutionnelles dans l’intérêt de toutes les parties prenantes de l’activité extractive.
Il a réuni des acteurs des secteurs public, privé et de la société civile impliqués dans la gouvernance de l’industrie extractive.
Les discussions se sont basées sur les résultats de recherche et d’analyse issus de l’étude du NRGI sur les réformes en matière de transparence et de responsabilité et les études de la CEA.
En effet, l’Indice de gouvernance des ressources naturelles que NRGI a publié en 2017 avait conclu que les pays qui affichaient une faible gouvernance des ressources naturelles sont ceux qui généralement ne suivent pas les règles qu’ils ont mises en place. Des insuffisances avaient été relevées dans certains pays dans le processus de collecte et de transfert des revenus, le processus de négociation des contrats miniers, dans la transparence du secteur. Des insuffisances dans la redevabilité ont aussi été relevées. Concernant les questions de transparence, l’étude avait mis le doigt sur l’accès à l’information sur les versements par les entreprises. Mais les pays mettant en œuvre l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE) ont surmonté cette insuffisance. Toutefois, la publication des contrats, la lutte contre la corruption et les conflits d’intérêt des agents publics dans le secteur minier, la divulgation des propriétaires réels des sociétés minières ne sont pas communiquées dans plusieurs pays. Les discussions ont permis d’identifier les pistes de travail pour réduire les lacunes dans la mise en œuvre des textes législatifs aux niveaux national, régional et continental.
Lors des discussions, le cas du Maroc a retenu l’attention des participants. Ce pays n’accorde pas de fiscalité particulière au secteur minier comme dans plusieurs pays de l’Afrique. Toutes les sociétés extractives sont soumises à la fiscalité du droit commun. Elles paient en plus une taxe qui est reversée aux Conseils régionaux. La loi de finances 2020 a introduit une réforme fiscale au profit des acteurs qui évoluent dans la recherche. Une partie de la taxe régionale sera reversée au niveau des collectivités abritant les mines. Afin de mieux profiter de son secteur extractif, le Maroc est passé à la transformation et à la valorisation de son phosphate. Une réforme qui vise à apporter plus de valeur ajoutée du secteur au pays en plus des écoles de formation dont le pays dispose pour la formation de ses cadres.
L’Ethiopie a réformé son secteur et autorise la Banque centrale du pays à acheter l’or produit sur le territoire. Cette volonté de capter la production nationale est confrontée aux circuits illicites de vente d’or.
Elie KABORE
Qu’en est-il du Burkina Faso ?
La révision du Code minier en 2015 a été un tournant décisif dans la réforme du cadre légal. Mais 4 ans après, d’importantes dispositions de ce Code restent non mises en œuvre par un défaut de textes d’application. Il s’agit, entre autres, de la publication des conventions minières dans le Journal officiel, les indemnisations des populations impactées, la préférence de l’expertise nationale dans les emplois et dans la passation des contrats de prestations de fourniture de biens et services locaux, la publication régulière des informations sur le secteur par le ministère en charge des mines, la réhabilitation des sites miniers afin de préparer l’après-mine, la prévention et la réparation des violations des droits humains des communautés affectées enregistrées dans le cadre des activités minières, etc. Certaines dispositions qui ont connu la prise de textes d’application souffrent dans l’application, comme c’est le cas de l’alimentation du Fonds minier de développement local ou du Fonds de réhabilitation des sites miniers.