Un article de 2017, parfaitement écrit, a piqué mon attention. Il relate tous les bienfaits que le gouvernement américain a généreusement fournis aux pauvres femmes martyrisées de l’Afghanistan (voir encadré). Et la journaliste d’ajouter: «Les féministes afghanes ne peuvent empêcher ou retarder ce qui est probablement inévitable – le retrait attendu des Etats-Unis. Il est temps d’agir seules pour elles-mêmes.»
Je reste perplexe: la journaliste veut-elle dire que les femmes afghanes souhaitent que leur pays demeure occupé par l’armée américaine? Pour avoir plus de droits, elles choisiraient l’occupation de leur pays? Elle parle même de la déclaration de Moscou, comme quoi la politique est faite de sentiers imprévus, comme plateforme prédéfinie avec les Talibans pour les droits des femmes. Elle va encore plus loin dans son argument en relatant la frustration de femmes afghanes face aux pourparlers de paix: les droits des femmes seront définis comme une affaire intra-afghane. Elles estiment que les droits des femmes devraient être imposés par les Etats-Unis.
Arguments ambigus
Je ne sais pas si cet article aux arguments ambigus justifie une guerre qui a duré dix-sept ans, fait 2.500 Américains morts et un nombre indéfini d’Afghans et 126 milliards de dollars de dépenses. Pour quel résultat? Un pays entièrement détruit et des Talibans toujours en place.
Il est clair que cet article est totalement favorable aux Etats-Unis. Il veut montrer tout le bien que ce pays fait aux autres pays pauvres, y compris par la voix de la guerre. Il y a de nombreuses années que j’ai compris que souvent, les Etats-Unis choisissaient les femmes comme porte d’entrée lorsqu’ils souhaitaient investir un pays musulman. Au temps de la 1re Dame Hillary Clinton, j’avais quitté le PRB parce que les femmes afghanes y sont présentées sans volonté, totalement soumises au diktat pachtoun.
Le plus important maintenant, la solution urgente est le droit économique. A mon sens, en parallèle à ce travail, une des urgentes et déterminantes revendications est celle des droits économiques et sociaux pour les femmes des couches défavorisées. Le droit ne peut être à deux vitesses. Il s’applique et a des incidences sur toute la société, toutes couches confondues. Nous serions ravies d’ouvrir un débat avec Cheryl Bernard et même de la recevoir dans nos contrées. Depuis 1980, les USA ont attaqué d’une manière directe ou indirecte 18 pays musulmans. Il est clair que toutes ces guerres ont fait des dégâts énormes non seulement humains, matériels et financiers, mais surtout des incidences d’incompréhension mutuelle.
Le temps de la sagesse est venu, le temps pour laisser de côté toutes ces préjugés.
Les Afghanes ne sont pas différentes des autres femmes. Ce sont quelques Américaines, malheureusement, les plus visibles parmi elles, qui, à force de matraquage et d’agenda divers, se voilent la face pour justifier l’injustifiable.
L’Economiste Edition N°:5526 Le 29/05/2019