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Affaire Tambao : D’anciens ministres des Mines mis en accusation

Le ministère en charge de la Justice vient de mettre en branle la procédure de mise en accusation d’anciens ministres des Mines et des Finances dont la responsabilité est reconnue dans la perte des milliards FCFA par l’Etat burkinabè dans l’exploitation du manganèse de Tambao. En effet, entre 2007 et 2012, les trois sociétés qui se sont succédé sur le site de Tambao ont toutes engagé des procédures judiciaires contre le Burkina parce que ces ministres ont pris des décisions qui ont conduit le Burkina à payer des milliards FCFA à titre de dommages.
L’affaire remonte en 2007, plus précisément le 3 avril 2007. Ce jour-là, le gouvernement burkinabé, représenté par son ministère des Mines de l’époque, signe un protocole pour la réalisation des projets intégrés et la mise en valeur du gisement de manganèse de Tambao avec la société émiratie Wadi Al Rawda Industrial Investments.
Dans le protocole, Wadi s’engageait à réaliser toutes les études entrant dans le cadre de la construction de la route Dori-Tambao, la construction du chemin de fer Ouaga-Tambao et le relogement des familles à déplacer sur le site du gisement. Wadi commandite une étude de faisabilité auprès du cabinet londonien Weatherly.
Les résultats de cette étude devaient permettre à Wadi de solliciter un permis d’exploitation du gisement de Tambao. Weatherly a déposé son rapport en septembre 2008. A partir de là, le gouvernement, sans expliquer pourquoi, lance un appel d’offres restreint auprès de 4 sociétés pour l’exploitation du manganèse de Tambao. Une manière d’ignorer le protocole signé avec Wadi et un refus de reconnaître les droits de la société sur Tambao. Wadi et Weatherly, qui s’estiment victimes d’une rupture unilatérale du protocole, déposent un recours devant la Chambre de commerce internationale (CCI) de Paris. Le gouvernement décide alors de négocier avec elles le verdict. Selon nos informations, la somme d’environ 5 milliards FCFA a été versée à Wadi et Weatherly.
Général Nice ressources (GNR), une société indienne, est désignée adjudicataire de l’appel d’offres. En octobre 2010, un nouveau protocole est signé entre le ministre des Mines de l’époque, Abdoulaye Abdoulkader Cissé, et le Directeur général Afrique de GNR, Magipudy Ravi Shankar. Ce protocole sera révisé le 26 mars 2011. Dans le nouveau protocole, l’Etat burkinabé a promis qu’en cas de validation des études de faisabilité techniques, financières et environnementales, il délivrerait à la société tous les titres miniers et autorisations nécessaires aux activités d’exploitation du gisement.
Cette société ne fera pas long feu sur le site, puisque le Conseil des ministres du 14 décembre 2011 adopte un rapport relatif à la sélection d’un investisseur par la procédure de consultation restreinte en vue de la mise en valeur du gisement de manganèse de Tambao. Le 11 janvier 2012, le président de la Commission d’attribution des marchés du ministère des Mines lance un avis d’appel d’offres restreint auprès de 8 sociétés. Les sociétés Wadi et GNR font partie des sociétés consultées. Pan Africain Burkina a obtenu le marché devant GNR, classée deuxième, et Vilar Mir Group et Glencore international AG. Le 12 juin 2012, GNR et Vilar Mir Group contestent les résultats devant le président du comité de règlement des différends (CRD) qui a estimé que la Commission d’attribution des marchés était irrégulière et incompétente pour recevoir et évaluer ces offres et a invité l’autorité à tirer toutes les conséquences. Le CRD n’a pas examiné les requêtes des plaignants dans le fond, alors que ceux-ci reprochaient à Pan African Burkina de n’avoir pas fourni dans son offre ni document officiel attestant le financement du projet, ni document certifié justifiant le chiffre d’affaires et le patrimoine.
Nonobstant cette déclaration d’incompétence de la Commission d’attribution des marchés, le samedi 11 août 2012, le gouvernement burkinabè, représenté par Salif Kaboré, alors ministres des Mines, et Pan african Burkina signent une convention d’un montant de 350 milliards de francs CFA. Le 25 juillet 2012, GNR sollicite une médiation auprès du Centre d’arbitrage, de médiation et de conciliation de Ouagadougou (CAM-CO) sans obtenir un résultat. Elle se déporte à la CCI à Paris.
C’est à ce moment que Salif Kaboré entre en jeu. Il va à la rencontre des dirigeants de GNR au nom de l’Etat burkinabè et signe, le 4 juin 2013, un accord qui dit que le Burkina s’engage à verser 14,880 millions de dollars (8,2 milliards FCFA) à la société pour qu’elle laisse tomber la procédure d’arbitrage. De retour, le ministre des Finances de l’époque refuse un tel paiement. Ne voyant rien venir, GNR active son dossier à la CCI et le Burkina a été condamné, le 3 février 2016, à payer exactement 15.125.946,35 dollars (8,4 milliards FCFA) au titre des dommages et intérêts, dont les 14,880 millions de dollars de l’accord transactionnel et en plus, 245.946 dollars US de frais d’arbitrage.

Elie KABORE


Les recommandations de la Commission d’enquête parlementaire

La Commission d’enquête parlementaire (2016) avait proposé une résolution portant mise en accusation d’un ancien ministre en charge des mines de 2005 au 30 octobre 2014, relativement au dossier Tambao;
Engager la responsabilité de l’ancien ministre chargé des mines d’alors dont la mauvaise gestion a conduit à la condamnation du Burkina Faso au paiement de dommages et intérêts d’au moins quinze millions (15.000.000) de dollars US, et à un risque évident d’un autre procès ;
Ouvrir une enquête judiciaire sur la responsabilité des anciens ministres des Mines et des Finances, sur la gestion et la destination du bonus versé par PAN. L’action du ministre de la Justice ouvre la voie à cette mise en accusation, puisqu’ils ont agi en tant que ministres.

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