L’Economiste du Faso : Quelle est la composition du Conseil régional et dans quelles conditions travaillent les conseillers?
Dans quelles conditions avez-vous trouvé la région à votre installation ?
Pour ne pas paraphraser quelqu’un, «nous, nous sommes des conseillers post-insurrectionnels». C’est à la faveur de l’insurrection et la dissolution des institutions et la reprise des élections en 2015-2016 que nous sommes arrivés au conseil régional du Centre-sud. Nous sommes venus trouver que le plan de développement régional qui avait été élaboré en 2009 était échu. Le budget alloué à la suite de l’insurrection était vraiment très réduit. Voilà un peu les conditions dans lesquelles nous avons trouvé le conseil régional, et dès notre arrivée, nous avons essayé de travailler à donner une certaine visibilité à ce conseil.
La priorité du nouveau conseil était de voir comment doter la région d’un nouveau référentiel en matière d’investissement pour avoir une visibilité en termes d’intervention. Avec le concours de nos partenaires tels que le PADR, nous avons pu revisiter ce plan de développement régional pour le mettre en phase avec le référentiel au niveau national qu’est le PNDES. A ce jour, nous avons un plan de développement qui a été participatif et qui doit être mis en œuvre dans la période 2018 -2023.
Qu’est-ce qui a changé depuis votre installation ?
Il faut dire que nous avons une vision pour la région. Nous avons decliné un certain nombre d’objectifs et élaboré des axes stratégiques en phase avec le PNDES. Nous avons estimé que notre région est une région agricole, environ 94% des habitants de cette région s’adonne à la terre et à l’élevage.
Donc nous avons essayé de mettre l’accent sur le secteur rural pour qu’il y ait une transformation véritable de ces secteurs afin de booster l’économie locale. Je pense qu’avec la contribution des fils et filles de la région, nous y croyons et nous pensons que nous arriverons à réaliser ce que nous avons prévu dans ce plan de développement régional. Mais également, à travers une mobilisation de ressources auprès des partenaires et l’accompagnement constant de l’Etat. Nous savons également que le rôle de collectivités, c’est de rendre des services sociaux de base tels que l’enseignement à travers la construction d’un certain nombre d’infrastructures scolaires au profit de la région, la santé en dotant nos formations sanitaires d’équipements sanitaires et de matériels médico-techniques adaptés aux besoins, sans oublier des aspects tels que l’eau potable et l’assainissement.
Quels sont vos chantiers prioritaires ? Et quels sont les moyens dont vous disposez pour y arriver ? Les difficultés pour conduire vos missions ?
Les difficultés, il en existe, la décentralisation signifie la gestion des affaires locales par la population. Cela veut dire que l’Etat central qui avait l’habitude de par le passé d’investir auprès des populations ne veut plus le faire donc, il devait y avoir ce qu’on appelle le transfert des ressources et des compétences dans les collectivités locales; mais jusqu’à une date récente, ce transfert n’était pas effectif au niveau des collectivités régions.
Au niveau des collectivités communes, il faut dire que l’éducation, la santé, l’eau et l’assainissement avaient déjà été transférés mais au niveau des collectivités régions, aucun transfert n’avait été effectué jusqu’à une date récente mais nous constatons avec joie que depuis pratiquement le mois d’octobre, il y a quand même des débuts de transferts notamment des infrastructures à travers les pistes rurales, nous venons de recevoir un arrêté au profit des collectivités régions.
Nous osons croire comme décrit dans le PNDES que le taux de transfert jusqu’à présent qui était de 4% va passer à 15% à l’horizon 2020. Ce transfert devrait être effectif pour que les collectivités puissent s’assumer et gérer les affaires locales. Il y a aussi que le budget de fonctionnement n’est pas suffisant, l’Etat nous alloue chaque année des moyens pour pouvoir fonctionner mais je vous dis que ces ressources allouées n’arrivent pas à assurer le minimum de fonctionnement au niveau des collectivités si bien qu’il y a des problèmes d’efficience qui sont constatés dans la gestion de certaines maitrises d’ouvrages confiées aux collectivités . Je pense que c’est essentiellement les principales difficultés au niveau des collectivités.
Dans ce cas, quelles sont vos principales sources de revenus ?
Une région n’a pas de territoire propre à elle, donc ne peut pas avoir de fiscalité ou de taxes propres qu’elle est appelée à collecter. Les ressources de la région proviennent de l’Etat pour le fonctionnement et pour l’investissement mais également des quotes-parts des impôts collectés localement par les communes de son territoire. La région du Centre-sud comporte 19 communes. Donc, l’Etat a instauré des taux de prélèvement que la trésorerie doit faire au profit de la région, je pense que le prélèvement le plus important est la taxe de jouissance qui constitue près de 25% des recettes collectées par les communes et c’est cela qui constitue notre principale source de revenus qui représente plus de 60% des recettes dont la commune bénéficie. Il faudra que nous travaillions à repenser le développement de la région, à ce rythme nous pourrons déclencher un véritable développement de nos régions.
L’association des régions et l’association des maires du Burkina Faso ont eu à faire un plaidoyer auprès de leur tutelle et du ministère des finances pour qu’ils puissent dégager des impôts directs au profit des régions. Par exemple, lorsqu’un marché est exécuté dans une région, il y a l’enregistrement du marché qui coûte près de 3% du coût du marché, ces 3% sont reversés à l’Etat central. Lorsque la TVA est collectée, elle est reversée à l’Etat central qui en dispose comme il veut, à ce rythme nous ne pourrons pas enclencher un véritable développement de nos régions .Nous pensons aussi que le développement du pays ne passera pas par les communes mais obligatoirement par les régions.
Nous militons à ce que l’Etat puisse doter les régions de fiscalité propre qui sera prélevée directement au profit de la région pour un développement plus harmonieux et équitable au profit de toute la population de la région. Les régions qui arrivent à collecter de ressources, ce sont des investissements qu’elles avaient eus à travers des projets tels que le PNGT ou le Fonds permanent pour le développement des collectivités territoriales grâce auxquels elles ont réalisé un certain nombre d’investissements marchands et mensuellement collectent des taxes et locations qui sont reversées au profit de la région.
Propos recueillis par AT
Qui est le président du Conseil régional ?
Je suis le Dr Modeste Yerbanga je suis pharmacien actuellement Président du conseil régional (PCR) du Centre-sud depuis la dernière élection depuis mai 2016.
J’ai pris fonction effectivement en juillet 2016 comme président du conseil régional du Centre-sud. Il faut dire que je suis d’abord pharmacien, j’ai commencé mon parcours professionnel en 1999, lorsque j’ai fini mes études à l’université de Ouagadougou.
J’ai été premièrement affecté au centre hospitalier régional de Koudougou où j’ai séjourné pendant deux ans. Puis en 2001, j’ai rejoint la Centrale d’achats des médicaments essentiels génériques et de consommables médicaux (Cameg) où je suis resté jusqu’en janvier 2012 avant d’évoluer dans le secteur privé.
En Août 2011, j’ai ouvert la pharmacie Naira, et en 2013 j’ai créé d’autres entreprises évoluant dans le domaine médical. Il faut ajouter que je suis un militant du Mouvement du peuple pour le progrès MPP et membre du groupe politique national de ce parti.