Une des recommandations de la conférence sur la réforme du système de rémunérations des agents publics de l’Etat, tenue du 12 au 14 juin 2018, a porté sur la suppression de certaines institutions dites budgétivores. Celles citées à l’occasion étaient le Conseil économique et social (CES), du Médiateur du Faso, du Haut-Conseil pour la réconciliation et l’unité nationale (HCRUN) et le Haut-Représentant du président du Faso. Cette proposition rejoint celle de la Confédération générale du travail du Burkina Faso (CGT-B) qui ajoute à cette liste le Haut-Conseil du dialogue social (HCDS). L’Economiste du Faso a examiné les budgets de ces structures pour se rendre compte qu’elles ne sont pas aussi budgétivores que l’on veut le faire croire. L’appellation «institution» que l’on colle à toutes ces structures n’est pas exacte. Seuls le Conseil économique et social (CES) et le Médiateur du Faso ont rang d’institution de la République et sont consacrés par la Constitution. A ce titre, ces 2 institutions bénéficient d’un budget autonome du budget national. Pour l’année 2018, la loi N°052-2017/AN portant loi de finances pour l’exécution du budget de l’Etat/exercice 2018 adoptée le 27 novembre 2017 a alloué un budget de 426,980 millions de FCFA au Médiateur du Faso et 913,508 millions de FCFA au CES. Le budget cumulé de ces 2 institutions serait d’environ 1,340 milliard de FCFA. Ces budgets prennent en compte les investissements, le fonctionnement, les salaires, etc. La grande partie du budget du CES, par exemple, est destinée à l’organisation des 2 sessions ordinaires par an. En examinant les budgets de chaque session, on constate que chacun des 90 conseillers bénéficie d’une prise en charge journalière de 15.000 FCFA. Une somme nettement en dessous de ce que perçoivent d’autres personnes du même rang dans d’autres instances où un minimum de 35.000 FCFA est servi par jour. L’Economiste du Faso a également examiné le budget du Haut-Conseil pour la réconciliation et l’unité nationale (HCRUN). Il serait d’environ 300 millions de FCFA. Un faible budget pour prendre en compte le fonctionnement et les activités de la structure. Conséquence : la majorité des activités du HCRUN est prise en charge par des financements extérieurs, notamment du Programme des Nations-Unies pour le développement (PNUD). Le soutien du PNUD, estimé à 300 millions de FCFA, est identique au budget alloué par l’Etat. Ce soutien a permis de financer les tournées dans les 13 régions et le voyage d’étude au Rwanda. Le budget de 300 millions de FCFA n’est pas à confondre à la somme débloquée par le gouvernement pour la prise en charge urgente des victimes de l’insurrection et du coup d’Etat. Ces prises en charge ont concerné les évacuations sanitaires et les opérations chirurgicales pour les blessés.
Le Haut-Représentant du président du Faso serait logé au sein de la présidence du Faso. Il ne bénéficie pas d’un budget autonome ; son fonctionnement relevant de la comptabilité de la présidence du Faso. Le Haut-Représentant a rang de président d’institution et bénéficie des avantages y rattachés.
Il dispose d’une équipe restreinte composée d’une secrétaire de direction, d’un directeur de cabinet, de 4 conseillers techniques et d’un chargé de missions. En dehors du chargé de missions, tous les membres de l’équipe sont des agents de la Fonction publique affectés. Pour l’équipement des bureaux du Haut-Représentant, le président du Faso aurait lui-même sorti l’argent de sa poche. La dernière structure taxée de budgétivore est le Haut-Conseil du dialogue social. Selon nos informations, jusqu’en début juillet 2018, la structure ne disposait pas de budget pour l’année 2018, malgré la promesse du gouvernement ; alors que l’année tire à sa fin. Difficile donc de se prononcer sur cette structure, puisque son budget n’est pas connu.
Dommage pour une structure dont la responsabilité est l’approfondissement du dialogue avec les partenaires sociaux dans un pays secoué par des grèves à répétition. Avec un budget cumulé d’environ 1,640 milliard de FCFA, peut-on encore qualifier le CES, le Médiateur du Faso et le HCRUN de budgétivores ?
Cette somme ne vaut pas le budget de fonctionnement de certaines directions centrales dans certains ministères. En 2016, par exemple, les exonérations fiscales accordées dans le cadre de la promotion immobilière ont été évaluées à 35,34 milliards de FCFA, contre 30,51 milliards de FCFA en 2015.
Les budgétivores sont à rechercher ailleurs
Comparaisons n’est pas raison, mais le parlement dispose d’un budget de 16,673 milliards de FCFA pour l’année 2018. Le budget de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) serait de 1,282 milliard de FCFA. Le budget 2018 de la Cour des Comptes serait de 1,142 milliard de FCFA. L’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et de lutte contre la corruption dispose d’un budget de 3,850 milliards de FCFA pour l’année 2018. Un budget revu à la hausse pour prendre en compte la construction du siège de la structure. Sinon, le budget annuel de l’ASCE-LC ne dépasse pas le milliard de FCFA. Le budget 2018 du Conseil supérieur de la communication serait de 1,405 milliard de FCFA et celui de la grande Chancellerie 728,925 millions de FCFA. La masse salariale globale de l’Etat est de l’ordre de 630,70 milliards de FCFA en 2018, pendant que 240,560 milliards de FCFA reviennent à la santé, 422,005 milliards de FCFA à l’éducation, etc. Les institutions et structures budgétivores sont donc à rechercher ailleurs.
Elie KABORE