Le procès des présumés auteurs du putsch manqué de septembre 2015, malgré toutes les embûches de procédures soulevées par les avocats de la défense, est entré dans la phase très attendue des auditions. Petit à petit, les choses se précisent sur qui a fait quoi et qui a dit de faire quoi. En attendant l’audition des Généraux Gilbert Diendéré et Djibrill Bassolé, l’audition des seconds couteaux du putsch permet de mettre en lumière deux évidences.
La première, c’est le clanisme dans l’armée, sous la transition. Entre le clan du Premier ministre Zida, le clan du Général Diendéré et celui du Général Bassolé, l’atmosphère était délétère au point où c’était à celui qui dégainera le premier qui l’emportait. Et, la tentative de putsch en est la parfaite illustration : un camp a voulu neutraliser l’autre. Le hic dans le scénario, c’est que les auteurs ont sous-estimé le changement des temps et un peuple qui n’était plus prêt à se soumettre à une dictature corporatiste, malgré l’habillage politique que l’on a tenté après d’en faire. La seconde évidence, c’est qu’au sein de notre armée ou, du moins, du régiment de sécurité présidentielle, la notion de grade n’avait pas grande signification.
Les débats à l’audience ont montré qu’un subalterne pouvait enjoindre ou transmettre à un supérieur un ordre venant de qui de droit, sans que les ordres suivent la voie hiérarchique normale.
Certains accusés ont tenté d’expliquer cette «anarchie» en lien avec la situation que traversait le RSP en son temps, notamment la guerre des clans et la menace de sa dissolution. N’était-ce pas là le chant du cygne d’un régiment en perte de vitesse? Ce procès, quel que soit le sort de chacun des accusés, sonne comme la seconde mort pour le RSP, en attendant le grand oral du Général Diendéré. Il a déjà assumé la responsabilité du putsch ; reste à savoir s’il acceptera de plonger seul.
Abdoulaye TAO