De 2016 à nos jours, l’impact financier des mesures de revalorisations salariales et indemnitaires est évalué à 181,421 milliards de F CFA, selon des chiffres encore provisoires. Rien que dans le budget 2016, ces mesures ont impacté les dépenses de personnel à hauteur de 55,880 milliards de FCFA. En 2017, cet impact était de 67,510 milliards de FCFA. Selon les projections du gouvernement, elles impacteront les dépenses de personnel des budgets 2018, 2019 et 2020 respectivement de 91,594 milliards de FCFA, 103,294 milliards de FCFA et 100,822 milliards de FCFA au moins. Avec de telles augmentations, le Burkina Faso court un risque d’insoutenabilité de la masse salariale, puisque qu’en 2020 les dépenses de salaires atteindront les 1.000 milliards de FCFA.
Ces revalorisations salariales et indemnitaires ont été favorisées par la faiblesse du dispositif de gestion des rémunérations des agents publics de l’Etat. En effet, malgré les rencontres annuelles entre gouvernement et syndicats sur les problèmes de l’ensemble des travailleurs, depuis au moins 2 ans, les revendications salariales, indemnitaires, statutaires et autres avantages sont portées par les syndicats des différentes corporations. Au titre des autres avantages, on cite les fonds communs et assimilés dont plus d’une vingtaine est servie à des agents d’une dizaine de ministères et institutions. Ces autres avantages qui sont en hausse d’année en année posent un problème d’équité dans leur allocation, créant des frustrations au sein des autres corps de métiers.
Le président du Faso avait qualifié ces revendications d’actions au «cas par cas» dans son discours de fin d’année 2017. Ces revendications au «cas par cas» ont abouti à des accords qui ont eu pour conséquence la multiplicité de statuts autonomes et de grilles salariales et indemnitaires.
La tenue de la conférence nationale sur la réforme du système de rémunérations des agents publics de l’Etat annoncée pour mi-mai 2018 se penchera sur des solutions durables à apporter au système de rémunérations des agents publics de l’Etat. Cette conférence réunira le gouvernement et les forces vives de la nation, au nombre desquelles les organisations syndicales. Elle sera consacrée à l’examen de l’ensemble des propositions que les différents acteurs ont apportées suite à la remise de l’étude diagnostique du système de rémunérations des agents publics de l’Etat le 28 février 2018.
L’Economiste du Faso a eu vent du contenu de quelques propositions des forces vives de la nation qui seront discutées au cours de cette conférence sur la réforme du système de rémunérations des agents publics de l’Etat.
5 sur les 6 centrales syndicales que compte le Burkina Faso ont transmis leurs propositions au gouvernement. Seule la Confédération générale du travail du Burkina (CGT-B) a joué à la politique de la chaise vise.
A ce propos, une partie des forces vives estime que les propositions de réformes du système de rémunérations des agents de la Fonction publique doivent concerner l’ensemble des Burkinabè, y compris les retraités, parce que ce sont les différentes contributions des populations en termes d’impôts qui entretiennent la Fonction publique.
Sur le champ d’actions de la réforme, outre les agents publics de l’Etat, il sera élargi aux hautes autorités comme le président du Faso, le président de l’Assemblée nationale, le Premier ministre et les membres du gouvernement, ainsi qu’aux présidents d’institutions. Les enseignants-chercheurs, les enseignants hospitalo-universitaires, les chercheurs, les agents des projets et programmes de développement, les députés, les militaires et les gendarmes devront être concernés par la réforme, ainsi que les agents régis par des statuts autonomes (magistrats, greffiers, corps paramilitaires, Fonction publique territoriale, Fonction publique hospitalière, Fonction parlementaire, établissements publics de l’Etat).
A propos des fonds communs, leur caractère «discriminatoire et injuste» a été réaffirmé. Il n’y a pas de raison qu’une seule partie d’agents en bénéficie, alors que l’ensemble des agents contribuent au fonctionnement de l’administration et au développement du pays, estiment certaines forces vives. En plus, face au manque de ressources pour le Burkina, un agent public ne doit pas se prévaloir d’un droit acquis pour refuser une réforme du système de motivations. Il a donc été proposé de relire tous les types de fonds communs alloués aux agents, en vue du plafonnement de leurs montants. Des propositions tendant à fusionner tous les fonds communs pour en faire un fonds commun national unique à répartir annuellement entre tous les fonctionnaires burkinabè ont aussi été faites. Toutefois, des primes de rendement indexées à des critères précis de performances, avec un plafonnement annuel, seront instituées. A propos du mérite, il a été proposé la fin des promotions et des décorations de complaisance. Les forces vives ont aussi proposé l’adoption d’un seul statut général de la Fonction publique pour régir tous les agents publics de l’Etat. Ce statut sera régi par le principe «à diplôme égal, salaire égal». Il sera assorti d’une grille indiciaire unique mettant fin aux iniquités et valorisant le mérite individuel. Des indemnités qui tiennent compte des spécificités des emplois, avec un plafonnement annuel, ont été proposées.
Elie KABORE
Réduire le train de vie de l’Etat
Certaines propositions concernent la réduction du train de vie de l’Etat. Concrètement, au niveau des hautes personnalités de l’Etat, il s’agit de diminuer le montant des indemnités de responsabilité, de signatures des contrats des ministres quelles que soit leurs provenances, en tenant compte des réalités du pays, des frais de carburant et des frais de missions.
La baisse notoire des charges de bâtiments administratifs, des consommations de carburant, d’eau, d’électricité, de téléphone et la gestion rationnelle du carburant ont été proposées.
Une des propositions tend à l’encadrement des commissions budgétivores dans les ministères, même pour de petites activités avec des déplacements hors de Ouagadougou. Les missions à l’extérieur et à l’intérieur du pays seront mieux contrôlées afin d’amoindrir les coûts. Sur la gestion du parc automobile, chaque ministre aura un seul véhicule et des ministères se doteront de véhicules permettant le transport en commun pour éviter les cortèges lors des déplacements des autorités. Sur les établissements publics de l’Etat, la réduction de leur nombre afin de les regrouper par nature d’activités et par similitudes de missions a été avancée.