Dans son discours prononcé le mardi 28 novembre 2017 à l’Université Ouaga I, le président français Emmanuel Macron a réitéré sa promesse d’augmenter le montant de l’aide publique au développement jusqu’à 0,55% du Produit intérieur brut (PIB) d’ici à la fin de son mandat. Cependant, Emmanuel Macron pose des conditions. Face à ce qu’il qualifie «d’argent qui va trop peu sur le terrain ; trop peu justement aux jeunes ou à ceux qui en ont le plus besoin», il a proposé une nouvelle stratégie ; une nouvelle philosophie qui inclue une évaluation de l’aide publique au développement, pour qu’elle soit plus efficace et plus en phase avec les réalités de terrain.
En d’autres termes, la France n’est plus prête à venir en aide aux pays africains suivant l’ancienne méthode.
En attendant la mise en œuvre de cette nouvelle stratégie annoncée par Emmanuel Macron, on constate que, de plus en plus, les partenaires extérieurs du Burkina Faso ont tendance à revoir à la baisse leurs aides budgétaires. En 2016, les dons projets et programmes ont été évalués à 286,27 milliards de FCFA. En 2017, sur une prévision de 346,38 milliards de FCFA, seulement 84,941 milliards de FCFA ont été mobilisés. Le gouvernement a donné les raisons de cette contreperformance devant les députés à la faveur de l’adoption du budget 2018. Au cours de l’année 2017, l’accompagnement des partenaires extérieurs a surtout porté sur le financement de projets et programmes de développement inscrits dans le Plan national de développement économique et social (PNDES), plutôt que sur les appuis budgétaires pour le compte du budget national. Cette situation a causé la baisse des prévisions d’appuis budgétaires.
Dans la réalité, la baisse de l’aide extérieure dénote de la méfiance que les partenaires techniques et financiers développent de plus en plus vis-à-vis des politiques publiques mises en œuvre par les gouvernements des pays en développement. Cette méfiance se justifie par le fait qu’il n’existe aucune évaluation de l’impact de l’aide publique au développement sur les populations. Ils ne manquent jamais l’occasion de le répéter aux gouvernements de ces pays. La seule certitude à propos de l’aide extérieure serait l’effectivité des dépenses des sommes reçues. A quoi ont-elles servi ? Ont-elles permis aux pays de résoudre des problèmes précis ? L’absence d’indicateurs d’impact final a engendré la perte de confiance des PTF et le renforcement de leur préférence pour les aides-projets. Cette perte de confiance des PTF se fonde aussi sur la non-existence de documents de stratégies de coopération au développement. Au manque de vision durable sur la coopération au développement s’ajoutent les lourdeurs administratives. Toute chose qui fait douter de l’efficacité des aides reçues.
Malgré cet état de fait, en 2018, les recettes totales du Burkina s’établissent à 2.018,155 milliards F CFA et à 2.441,318 milliards F CFA en dépenses. Dans ce budget, le gouvernement annonce une prévision de 257,37 milliards de FCFA comme appuis budgétaires. Pour combler le gap créé par la baisse de l’aide extérieure, les prévisions de recettes des régies ont été revues à la hausse afin de maintenir les prévisions au même niveau que celles inscrites dans les documents de programmation budgétaire. Par ce truchement, le gouvernement veut se conformer aux indicateurs de convergence de l’UEMOA. L’augmentation des recettes fiscales permet de tendre vers les 35% de ratio masse salariale/recettes fiscales, comme le préconise l’UEMAO. Si, en 2016, ce ratio était de 51,6%, il a été revu à la baisse en 2017 pour se situer à 41,9% et en 2018 il sera de 39,2%. Cette baisse observée de ce ratio serait imputable à l’augmentation des recettes fiscales entre 2016, 2017 et 2018 pour se maintenir respectivement à 1.075,40 milliards de F CFA, 1.315,49 milliards de F CFA et 1.607,98 milliards de F CFA.
Elie KABORE
La France au rendez-vous du développement
Ceci est un extrait du discours du président français : «J’ai pris l’engagement d’avoir une France au rendez-vous du défi de développement. Je sais que c’est très attendu. Aussi ai-je pris l’engagement, dès le début de mon mandat, d’atteindre, à la fin de celui-ci, 0,55 % du revenu national brut en termes d’aide publique au développement. C’est un engagement ferme ; il est exigeant. Il est exigeant. Il supposera des efforts ; nous les ferons. Parce que ces efforts, c’est la contribution française à la réussite de tout un continent; de nombreux pays ; parce que c’est une part de notre réussite aussi. Et donc, dans les prochains mois, une stratégie sera détaillée, préparée par le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères qui, année après année, expliquera très précisément comment nous y parviendrons avec des engagements financés et avec des financements à la clef.
Mais je ne veux pour autant pas que nous nous arrêtions aux chiffres. L’aide publique au développement, nous savons parfois ce que ça peut dire ; ce que cela a pu dire. De l’argent qui va trop peu sur le terrain ; trop peu justement aux jeunes ou à ceux qui en ont le plus besoin. Et donc, cette philosophie a été changée il y a plusieurs années en France sous l’autorité de Jean-Michel Severino dont je salue ici la présence, et qui est aujourd’hui porté à la tête de l’AFD (l’Agence française de développement) par Rémy Rioux, également à mes côtés.