L’Afrique, priorité de la diplomatie économique française. C’est la volonté du président Emmanuel Macron. Et il s’y est engagé dans son discours prononcé le 28 novembre dernier, à Ouagadougou, sur sa vision des relations entre la France et l’Afrique.
Sur la base de relations débarrassées des rancœurs historiques, qui se veulent réalistes et tournées vers un développement solidaire, Macron promet d’abord de revoir à la hausse l’aide publique française au développement. Cette contribution de la France au développement des pays pauvres, notamment ceux d’Afrique, est aujourd’hui à 0,38 % de son Revenu national brut (RNB). Elle va passer à 0,55 % du RNB, promet-il.
Mais au-delà de cette augmentation, c’est la façon de transférer l’aide qui, selon le président français, devrait changer pour une meilleure efficacité de cette aide. «Parfois, notre aide publique au développement ne répond pas aux besoins. Elle fait plaisir à des gouvernements français ou africains. C’est une mauvaise méthode. Elle doit être évaluée. Je souhaite que nous réfléchissions dans les prochains mois avec vous, peut-être, à un nouveau nom, à une nouvelle philosophie, à des nouvelles modalités d’actions», a déclaré Macron.
Outre l’aide destinée aux programmes publics de développement, la nouvelle diplomatie économique de la France en Afrique se base sur le secteur privé. Macron s’est engagé carrément pour une révolution de l’innovation et de l’entrepreneuriat en Afrique. Cette révolution cible le domaine du numérique, à travers un programme comme «Digital Africa», spécialisé dans l’identification et l’accompagnement des start-up africaines les plus prometteuses.
Il y a aussi le domaine de la transformation des produits de l’agriculture.
Mais avant d’entrer de plain-pied dans cette révolution, l’une des préalables est la formation des jeunes africains dans le domaine de la création d’entreprises. Pour cela, la France promet d’accueillir et de former 1.000 nouveaux talents africains chaque année. De même, elle va encourager les mouvements et les rencontres de partages d’expériences entre les Français et les Africains sur le continent.
Le symbole de ce brassage sera les Maisons de la Jeunesse en Afrique pour promouvoir les initiatives d’affaires franco-africaines. La première Maison de la Jeunesse sera inaugurée à Ouagadougou en juillet 2018.
Pour préparer l’innovation, il a également été prévu de mettre l’accent sur la recherche. «Je souhaite que les conditions soient réunies pour permettre aux chercheurs africains et européens de travailler ensemble sur des programmes communs. Nous devons donner les moyens financiers de structurer des réseaux de chercheurs européens et africains», a déclaré Macron.
En termes de contribution financière à la réalisation de la révolution de l’entrepreneuriat en Afrique, la France entend consacrer plus d’un milliard d’Euros au soutien des PME africaines.
La participation extensible passera par le canal l’Agence française de développement, la Banque publique d’investissement et les fonds d’investissement privés français. L’un des objectifs de cette initiative est de contribuer à créer les 450 millions d’emplois dont l’Afrique aura besoin d’ici à 2050.
Dans sa nouvelle diplomatie économique, la France de Macron va s’appuyer sur les rapports et les recommandations du conseil présidentiel pour l’Afrique. Une équipe de personnalités issues de domaines divers, avec une certaine expérience de l’Afrique, qui sera un lien permanent avec le continent et la France. Selon le président français, ce conseil restituera la voix de l’Afrique sans filtre, sans intermédiaire et sans concession.
Karim GADIAGA
Mise en garde contre la corruption des entreprises françaises
«Je souhaite que les entreprises françaises soient porteuses d’un partenariat exemplaire ; un partenariat exemplaire qui refuse la corruption, qui se plie aux appels d’offres, qui se plie aux règles édictées par les institutions africaines qui comme l’OHADA et font progresser la bonne gouvernance», a fait savoir Emmanuel Macron. «Les entreprises françaises qui viendront investir en Afrique et à se développer, et qui auront le soutien de l’Etat français seront exemplaires, car je leur demanderai aussi d’investir dans la formation professionnelle. Ce sera une condition que je fixerai à nos entreprises», a-t-il ajouté.
Macron prévient que pour bénéficier du soutien de l’Etat français, les entreprises devront s’engager dans la durée, financer des bourses, s’engager à développer des offres répondant aux besoins de la formation et enfin privilégier l’emploi local. «La France, elle, n’investira plus uniquement pour faire des opérations de gouvernement à gouvernement où il n’y a aucune retombée sur la population locale. Elle n’investira plus pour que des grands groupes participent parfois à des opérations organisées de corruption, mais elle sera vigilante pour faire en sorte que d’autres ne répliquent pas aujourd’hui, parfois avec une forme de fascination étonnante, les erreurs que nous avons commises ensemble hier et qui arrivent à de nouveaux investisseurs, avec des entreprises qui proposent des milliards, mais pas un emploi pour les Africains ; qui proposent des milliards avec la répétition des mêmes erreurs».