evant les députés, le 14 avril 2017, le Premier ministre Paul Kaba Thiéba a rappelé que l’année 2016 a été particulièrement agitée par une avalanche de grèves dans différents secteurs d’activités du pays, en particulier dans la Fonction publique. La même tendance se poursuit depuis le début de cette année, avec notamment des sit-in conduisant à la paralysie totale durant de longues périodes, au niveau de certains départements ministériels.
A la suite du Premier ministre, le président de l’Assemblée nationale, Salif Diallo, a dénoncé le fait qu’une minorité d’agents publics capte le maximum des revenus de l’Etat. Sur quoi reposent ces assertions?
On distingue 2 grandes catégories de pourvoyeurs d’emplois au Burkina Faso: d’une part le secteur formel qui fournit 6,4% des emplois. On retrouve dans le secteur formel le secteur privé et le secteur public. D’autre part, il y a le secteur informel qui englobe le reste des personnes actives.
En 2015, le nombre d’emplois formels (publics et privés) était estimé à seulement 685.625 dont seulement 24,2% de femmes. Au nombre de ces emplois formels, on dénombrait 154.846 agents de l’État, soit 22,6%. Parmi les agents de l’État, la proportion des femmes était de 33,3%.
Les dépenses sur les agents de l’État constituent une grosse charge dans le budget national. C’est ici qu’il faut comprendre le président de l’Assemblée nationale.
En 2015, par exemple, les dépenses de personnel pour les 154.846 agents de l’Etat se chiffraient à 469,214 milliards de FCFA sur une prévision de recettes de 1.516,501 milliards de FCFA, soit 30,90% des prévisions de recettes.
En 2016, ces dépenses sont passées à 507,958 milliards de FCFA, représentant 29,76% des 1.704,78 milliards de F CFA de recettes mobilisées au cours de l’année. En 2017, ces dépenses étaient d’un montant de 552,175 milliards de FCFA, représentent 27,11% des 2.036,301 milliards de FCFA de prévisions de recettes.
La contribution de ces agents de l’Etat en termes d’Impôt sur les salaires et traitements (IUTS) qui était de 11,335 milliards de FCFA en 2014 est passée à 11,719 milliards de FCFA en 2015 pour se situer à 17,144 milliards de FCFA en 2016.
Le Burkina Faso comptait environ 19 millions habitants en 2016 et pourrait atteindre 21 millions d’habitants en 2020. Le pays peut-il continuer à consacrer près de 30% de ces recettes aux dépenses d’environ 150.000 personnes? Question à débats. Au nom de la stabilité sociale, il peut rester dans cette posture commode. Ce serait alors le prix à payer. Mais l’équation reste entière. Comment satisfaire les revendications salariales sans hypothéquer les investissements pour le développement, en l’occurrence la mise en œuvre optimum du PNDES ? Le gouvernement n’a pas encore trouvé la solution miracle.
Pendant ce temps, on a dénombré 530.679 travailleurs du secteur privé immatriculés à la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS). Ce chiffre représente 77,4% des emplois formels. Parmi les travailleurs du secteur privé immatriculés à la CNSS, la proportion des femmes était de 21,6%.
Leur contribution à la mobilisation des recettes est importante. En effet, la part contributive des agents du secteur privé à l’IUTS était de 52,1 milliards de FCFA en 2014, représentant 82,07% des l’IUTS total collecté sur l’année. En 2015, le privé a contribué à hauteur de 53,9 milliards de FCFA, soit 82,1% de l’IUTS total et en 2016, les 54,588 milliards de FCFA d’IUTS collecté au titre du secteur privé représentait 76,09% de l’IUTS total.
Le poids de l’emploi national dans l’économie nationale est très important en termes d’impôts et taxes pour refinancer l’Etat. C’est la raison pour laquelle un des résultats que s’est assigné le Plan national de développement économique et social (PNDES) est celui de relever le défi de créer des emplois décents, notamment pour les jeunes et les femmes qui arrivent sur le marché du travail.
La Fonction publique n’absorbe qu’une infime partie des demandeurs d’emplois. Pour l’année 2017, 18.450 postes sont à pouvoir dont 11.096 pour les concours directs et 7.381 postes à pourvoir au titre des concours sur mesures nouvelles spéciales.
Un chiffre en deçà de celui de 2016 où sur 17.396 postes à pourvoir, 12.324 revenaient aux concours directs et 5.072 des mesures nouvelles.
Il revient donc au secteur privé et au secteur informel d’accueillir les autres personnes en quête d’emploi afin de résorber le chômage. A ce propos, les données de 2014 en notre possession évaluent à 6,6% le taux de chômage au Burkina Faso. Ce taux est plus élevé chez les femmes (9,3%) que chez les hommes (4%). Le taux de chômage est plus élevé en milieu urbain (7,1%) qu’en milieu rural (6,4%). Ils touchent principalement des jeunes.
Elie KABORE
Défis à relever
Le PNDES envisage de faire du secteur privé un des piliers de la croissance économique. Pour ce faire, il doit relever le défi des contraintes et difficultés auxquelles le secteur privé est confronté. En effet, en dépit des efforts de simplification des procédures de création d’entreprises, le nombre d’entreprises nouvellement créées reste faible.
Sur la période 2010 – 2015, il a été créé en moyenne 6.500 par an. Le taux de mortalité des entreprises est aussi élevé. Près de 20% des entreprises ont disparu en 2015, faute de mesures d’accompagnement et de suivi de la part du gouvernement.