A Tenkodogo, en 2016, les organisateurs de la Journée nationale du paysan (JNP) l’avaient annoncé: la 20e JNP devrait se dérouler sous un tout autre format. Mais force est de reconnaitre que ce ne sera pas le cas. C’est presque l’identique du format de Tenkodogo qui a été répliqué : exposition, ateliers et rencontre des paysans avec le chef de l’Etat comme clou. L’événement, c’est la rencontre avec le président du Faso. Il faut vraiment espérer que la JNP de Kaya sonne le requiem de cette longue tradition de rencontres qui a perdu de sa saveur au fil des ans. A Tenkodogo, la première du président Roch Marc Christian Kaboré, les organisateurs avait déjà senti le besoin de rupture. La question du format avait alors été posée.
Comment trouver un format efficace pour une manifestation qui rassemble plus de mille personnes ? Plus que le format, certains observateurs souhaitaient que l’on remette à plat la JNP et ils s’interrogeaient sur les inputs de cet événement sur la vie du monde rural, au-delà du folklore.
L’évaluation des JNP s’imposait et les acteurs en ont profité pour faire le bilan des 20 ans de ce rendez vous des paysans, pour amorcer un nouveau tournant. Cette évaluation s’est faite de manière participative par les acteurs eux-mêmes à travers des travaux en atelier sous la supervision des membres des équipes du comité technique de réflexions qui a été mis en place à cet effet, et ces principales recommandations devraient changer le visage de cette manifestation. Les concertations qui ont eu lieu sur le terrain à travers les régions permettent de dire que c’était le moment d’amorcer un nouveau virage. L idée de la biennale a prospéré, ainsi que la réduction du nombre de participants. Elle allie les préoccupations de fond à celles de forme. Deux ans, cela laisse la place aux acteurs de mettre en œuvre les recommandations et c’est le plus important. Car depuis Léo en 1993, première édition de la JNP, une bonne partie des recommandations n’a pas eu une suite positive, selon un spécialiste du monde rural burkinabè. Le délai d’un an ne permettait ni au gouvernement ni aux acteurs du monde rural d’entamer une quelconque mise en œuvre. A ce propos, voici ce qu’écrivait L’Economiste du Faso dans son édito numéro 156: «L’édition de Dédougou, en 2015, avait mis l’accent sur la productivité de l’exploitation agricole familiale dans l’atteinte de la souveraineté alimentaire. Cette édition-ci (NDLR:Tenkodogo) a planché sur le thème Agriculture et chômage des jeunes. Entre les deux éditions, que va-t-on capitaliser concrètement sur le terrain comme acquis?» Il ne s’agit pas de jeter le bébé avec l’eau du bain. Il y a des acquis indiscutables. Car l’évaluation a montré clairement la pertinence de la JNP aux yeux des producteurs burkinabè. C’est un cadre idéal pour poser les problèmes et tenter d’y remédier. Cependant, le rapport d’évaluation fait le constat des hiatus entre les attentes et les résultats de la JNP: «La formulation des engagements est certes faite de façon participative lors des fora régionaux, mais le constat est que ces engagements ne tiennent souvent pas compte des capacités réelles des acteurs et même de la période disponible pour leur mise en œuvre. Les acteurs n’évaluent pas les moyens qui seront utilisés, ainsi que les responsables de la mise en œuvre de ces engagements.
Cette situation contribue à réduire l’efficacité de la JNP». Les structures et acteurs responsables de la mise en œuvre des engagements et des recommandations seront clairement identifiés.
En plus du temps, des moyens devront être dégagés à cet effet.Pour l’organisation pratique, le Comité national d’organisation (CNO) et le Comité régional d’organisation (CRO) sont maintenus, avec cependant l’affectation de ressources conséquentes et à temps pour le second comité. Pour le suivi, un des talons d’Achille de la JNP, l’on devrait s’attendre à la mise en place d’un secrétariat permanent pour prendre en charge cet aspect. Tels sont, entre autres, les grands axes de la refonte des JNP à l’issue de l’évaluation faite par le gouvernement.
FW