Le Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC) est loin d’être satisfait des résultats de la gestion de la transition. Le 3 mai 2016, au détour d’une conférence de presse, le REN-LAC a relevé ce qu’il rappelle de «graves manquements dans la gestion de la transition».
Quatre points essentiels préoccupent le REN-LAC: l’audit de la gestion de la transition, les révélations concernant les acteurs de la justice, la reprise des concours directs de 2015 annulés et la question des déclarations d’intérêt et de patrimoine. Nacanabo Sagado, secrétaire exécutif adjoint du REN-LAC, a longuement communiqué autour de ces sujets. Le premier sujet a trait à la gestion de la SONATUR et celle des marchés publics.
«Nous notons que certaines révélations faites par la presse, notamment celles relatives aux parcelles de la SONATUR, ont été en grande partie confirmées (…), le Premier ministre ainsi que d’autres ministres de la transition ont acquis des parcelles à la SONATUR (…) en violation des dispositions de la Constitution», relève Nacanabo Sagado qui souligne que la Primature n’est pas la seule mise en cause dans l’audit de la gestion de la transition. Pour Bruno Kéré, chargé du plaidoyer et du lobbying au REN-LAC, c’est seulement dans cette institution qu’il y a eu le plus de manquements graves. Pour lui, «les différents manquements constatés doivent faire l’objet d’une répression sans complaisance. Toutes les personnes impliquées dans ces manquements (…) doivent répondre de leurs forfaits». De l’avis du REN-LAC, la gestion des terrains de la SONATUR et d’une manière générale, la gestion du foncier au Burkina Faso, «a été le terreau fertile à l’enrichissement illicite et du blanchiment d’argent sale».
La période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2015 a été retenue pour les besoins de l’audit. Le REN-LAC aurait souhaité que l’ASCE-LC remonte à la période du 1er novembre 2014 au lieu 1er janvier 2015 parce que, dit-il, «le traficotage des fonds de la présidence du Faso, allégué par la presse, reste en suspens» concernent cette période. Et de se demander: «Qu’en est-il des comptes du fameux Bureau militaire de la transition»? Le REN-LAC estime qu’un audit de cette période où Yacouba Isaac Zida assumait les fonctions de chef de l’Etat avant de devenir Premier ministre «aurait pu situer le peuple burkinabè sur cette question». Le REN-LAC dit ne pas comprendre que le président de l’Assemblée nationale reste «sourd et muet, face aux interpellations citoyennes à lui adressées, sur la nécessité de faire auditer la gestion du Conseil national de la transition».
La deuxième préoccupation de REN-LAC concerne les révélations sur les acteurs de la justice dont le dossier d’accusation d’escroquerie portée contre des acteurs de la justice et qui inclut des magistrats, des avocats et des agents de la Garde de sécurité pénitentiaire. Selon les confidences du Réseau national de lutte anti-corruption, un justiciable aurait déboursé plus de 77 millions de FCFA pour obtenir le dénouement d’une affaire en justice le concernant en sa faveur. Pour le REN-LAC, «ces largesses n’ont malheureusement pas porté les fruits escomptés et c’est en désespoir de cause que le justiciable en question a décidé de porter plainte contre ceux qui ont bénéficié desdites largesses». Le troisième point abordé par le REN-LAC est la reprise des concours directs de la fonction publique, session de 2015. Sur cette question, le REN-LAC pense qu’un «flou total entoure toujours les modalités de cette reprise».
Le Réseau qui fait de la lutte contre la corruption son cheval de bataille dit toujours attendre, à ce sujet, une suite à sa demande d’audience introduite auprès du ministre de la Fonction publique. Pour le REN-LAC, «l’esprit de revendication et de rétablissement de la justice et de l’égalité à l’égard des candidats malheureux de 2015 commande une reprise distincte des concours entachés de fraude». Il souhaite donc la reprise desdits concours afin que justice soit rendue aux candidats malheureux de 2015.
La quatrième préoccupation du REN-LAC concerne la déclaration d’intérêts et de patrimoine du président du Faso et des membres du gouvernement. Il fustige à ce niveau un «manque de sincérité concernant la déclaration de patrimoine de certains ministres». Si manque de sincérité il y a chez certains, le REN-LAC pense que chez d’autres la déclaration suscite des interrogations dans un «contexte africain très fertile au blanchiment d’argent».
Alexandre Le Grand ROUAMBA
Eviter de déclarer pour déclarer
Le REN-LAC n’est pas du tout satisfait de la façon dont les membres du gouvernement et le président du Faso ont déclaré leurs biens. Pour cette structure de veille, il appartient aux «différents acteurs et aux structures habilitées de faire en sorte que la déclaration de patrimoine ne soit pas un simple acte formel où l’on déclare pour déclarer, mais plutôt un instrument de prévention des conflits d’intérêt, de la corruption et de l’enrichissement illicite».