En matière de réforme du système de santé, figure en bonne place la mise en œuvre de l’Assurance maladie universelle (AMU). L’adoption de ce document par le CNT devrait permettre à tous les Burkinabè, quels que soient leurs classes sociales et leurs revenus, de bénéficier de soins de qualité.
Le problème, le manque criard d’infrastructures et de ressources humaines, véritable plomb dans la mise en œuvre de cette nouvelle loi. Les chiffres sont clairs, 3 CHU, 9 CHR, 47 CMA, 35 CM et 1.643 CSPS, pour une population totale estimée à 17.880.386 habitants en 2014, soit un rayon d’action moyen théorique des infrastructures sanitaires (y compris le privé) de 6,4 km selon les données du ministère de la Santé.
Le prochain chef du gouvernement aura la lourde charge de poser les rails de cette loi. Comment se fera sa mise en œuvre dans les prochaines années? Et quels seront les investissements prioritaires dans le secteur de la santé? En cette période de campagne politique, L’Economiste du Faso a tendu son micro à tous les candidats pour recueillir leurs propositions. Six d’entre eux ont répondu. En voici la synthèse.
Mise en œuvre de l’AMU
«Ce sera fait rapidement si je suis élu» dixit Zéphirin Diabré
Le président de l’Union pour le progrès et le changement (UPC), Zéphirin Diabré, affirme que pour la mise en œuvre de l’AMU, il appartient à l’Etat de prendre les décisions administratives qui s’imposent et «ce sera fait rapidement si je suis élu».
Quant à la politique de santé de son parti, Zéphirin Diabré table sur une «politique de construction des infrastructures sanitaires pour faciliter l’accès aux soins de santé».
Ainsi, le ratio habitants par CSPS passera de 9.759 en 2015 et à moins de 7.000 en 2020. «Je veux aussi réduire le rayon d’action théorique de 7 km à 4 km», a ajouté M. Diabré. Le développement du secteur de la santé passera aussi par la mise à disposition des malades de traitements dans des conditions avantageuses, d’une politique de formation accélérée du personnel de santé. «A cela s’ajoute ma volonté de développer une véritable industrie du médicament, pour assurer une certaine indépendance au pays dans ce domaine», conclut le candidat à la présidentielle.
«Je n’ai pas eu connaissance du texte», Salvador Yaméogo
Même s’il a affirmé n’avoir pas eu connaissance de la loi sur l’AMU, Salvador Yaméogo, président du Rassemblement des démocrates pour le Faso (RDF) et candidat à la présidentielle, salue néanmoins son vote. Pour lui, sa mise en œuvre passera par les décrets d’application qui vont suivre. «En tout état de cause, les maître- mots de ce projet et les clés de son succès doivent rester l’équité, la justice et la solidarité». Parlant d’investissements prioritaires dans le secteur de la santé, M. Yaméogo préconise l’élévation du plateau technique des différents CHU et CHR, en relation avec la formation des médecins (internes); la mise à disposition d’ambulances en nombre suffisant; le traitement de la question du corps médical à cheval entre les structures hospitalières étatiques et les cliniques privées et la question des médicaments essentiels génériques.
«Doter chaque commune rurale d’un Centre médical avec antenne chirurgicale»
Pour Victorien Barnabé Wendkouni Tougouma, président du Mouvement africain des peuples: «La mise en œuvre effective de l’AMU appelle une réforme de notre système de santé tant en matière de formation et d’augmentation de ressources humaines (médecins généralistes, spécialistes, infirmiers) qu’en matière d’infrastructures et d’équipements. Elle pose aussi la problématique du coût, de la qualité et de la disponibilité des médicaments».
Poursuivant dans ce sens, en termes de priorités, il s’agira de baisser le prix des médicaments et des consommables médicaux et de lutter contre les médicaments contrefaits ainsi que les médicaments de la rue. Des efforts seront aussi faits dans la prise en charge gratuite du palu, la création des Centres de soins spécialisés de haut niveau (CSSHN) dans les domaines du cancer, de la dialyse, de la neurochirurgie, de la cardiologie. «Nous doterons chaque commune rurale d’un Centre médical avec antenne chirurgicale et construirons 300 CSPS», a déclaré M. Tougouma.
Améliorer les conditions de travail du personnel soignant, selon Ram Ouédraogo «Nos investissements dans le secteur de la santé restent une de nos grandes priorités car une population malade n’est pas productive», affirme pour sa part le président du Rassemblement des écologistes du Burkina Faso (RDBEF), Ram Ouédraogo. Pour lui, il s’agira donc en termes d’actions de mettre en place l’AMU ainsi que la gratuité des soins pour les enfants de moins de cinq ans et les femmes enceintes et allaitantes.
Pour une décongestion des différentes urgences du CHU Yalgado Ouédraogo, l’accent sera mis sur les différents districts sanitaires, surtout dans les centres ruraux. Le volet ressources humaines n’a pas été oublié par le président du RDBEF. Il entend ainsi organiser régulièrement des stages et des formations ainsi que des échanges avec des hôpitaux étrangers au profit de notre personnel médical. «Les conditions de vie, de travail et de sécurité du personnel soignant seront améliorées», conclut Ram Ouédraogo.
«Construction et équipement des centres de santé» pour Tahirou Barry La vision du Parti pour la renaissance nationale (PAREN) de Tahirou Barry sur la question de la santé se résume en un programme: la construction et l’équipement des centres de santé et le relèvement de leurs plateaux techniques.
Pour ce qui concerne l’AMU, «sa mise en œuvre passe par un système de financement basé sur la capacité contributive des bénéficiaires».
«L’AMU peut changer la vie de millions de personnes» selon Jean-Baptiste Natama Seul candidat indépendant à avoir répondu à nos questions à la date du 10 novembre dernier, Jean-Baptiste Natama explique que l’AMU permettrait à ceux qui en ont le plus besoin de bénéficier de soins de santé vitaux, même si les difficultés ne manqueront pas. Pour M. Natama, elles seront au nombre de 2: le financement juste et équitable et le ciblage des populations. Toutefois, des pistes existent et Jean-Baptiste Natama s’engage à l’opérationnalisation de l’AMU selon une option qui assurera justice et équité.
En matière d’investissements dans le domaine de la santé, la «stratégie c’est la prévention», affirme le candidat à la présidentielle. Il s’engage à instituer une Journée nationale de salubrité populaire (JNSP), destinée à endiguer l’insalubrité; interdire l’entrée des sachets plastiques non biodégradables et à bouter les moustiques hors du Burkina Faso. «Je veux aussi investir massivement dans la formation des ressources humaines», a ajouté M. Natama qui entend construire une usine de fabrication de médicaments génériques avec l’ouverture d’un Institut paramédical.
NK
Il serait pertinent dans toutes ces visions positive d’amélioration des systèmes de santé, d’avoir approche justement systémique et d’aller vers une cohésion des divers acteurs du système. Le projet PADISS en RDC en est le parfait exemple. http://www.ulb-cooperation.org/projet/appui-au-developpement-integre-du-systeme-de-sante-au-nord-kivu