Les restes à recouvrer de la Société minière de Taparko (SOMITA) pour l’année 2013 est d’environ 1.709.681.264 F CFA selon le rapport de la commission d’enquête parlementaire: «Enquête parlementaire sur la fraude fiscale, l’impunité fiscale, les restes à recouvrer et les chèques impayés», rendu public le 16 octobre 2015. Pour les députés, la non-maîtrise des opérations comptables, financières et subséquemment de la fiscalité des sociétés minières par les agents de l’administration fiscale en serait la principale cause. Comment en est-on arrivé à cette situation ?
La perception des redevances minières est prévue par l’article 12 du décret n°2010-819/PRES/MEF du 31 décembre 2010 portant modification du décret n°2010-075/PRES/MEF du 3 mars 2010 portant fixation des taxes et redevances minières. Ce décret prévoit des redevances proportionnelles dont les taux sont variables, en fonction du cours mondial de l’once d’or : 3% si le prix de l’or est inférieur ou égal à 1.000 $ l’once, 4% si le prix de l’or est compris entre 1.000 et 1.300 $ l’once et 5% si le prix de l’or est supérieur à 1.300 $ l’once.
Cependant, constate les députés, les paiements sont faits en vertu d’une convention signée avec l’Etat, au taux unique de 3% quel que soit le cours de l’once. Ce qui occasionne des restes à recouvrer au niveau des redevances proportionnelles de la société SOMITA pour l’année 2013, auprès de la Direction générale du trésor et de la comptabilité publique.
«Au regard des données fournies par le ministère des Mines et de l’énergie, on constate qu’il existe une différence entre le montant des liquidations et celui des paiements», indique le rapport. Une mauvaise application de ce décret a engendré ces restes à recouvrer au niveau de cette société minière. En rappel, le total des restes à recouvrer relevé par le Trésor public de 2012 à 2014 s’élève à 49.036.399.561 F CFA selon le rapport.
Une autre insuffisance relevée par l’enquête parlementaire sur le prélèvement de la redevance minière concerne la véracité des informations sur la base desquelles les perceptions sont faites. La redevance sur l’or produit industriellement au Burkina Faso se calcule sur la base du cours de l’or du dernier fixing de Londres de la veille de l’expédition et cela conformément à l’article 7 de l’arrêté conjoint n°08-001/MCE/MEF portant conditions d’exportation de l’or produit industriellement au Burkina.
Cependant, les députés notent que «le même arrêté prévoit qu’il doit être tenu compte des écarts entre les perceptions résultant de l’estimation le jour de la pesée et celles dues à raison des recettes effectivement réalisées après raffinage. Cette différence doit faire l’objet de régularisation sur les perceptions de l’exercice suivant. Les redevances définitives sont donc prélevées sur les revenus nets après la réalisation de la vente».
Les députés se sont donc interrogés sur la maîtrise de la vérification des quantités et des teneurs du minerai expédié par les services compétents (voir encadré). C’est ainsi qu’ils ont demandé à vérifier les quantités et les teneurs des minerais exportés en 2012, 2013 et 2014, mais le ministère des Mines et de l’énergie n’a pu fournir que des états de rapprochement des redevances sur les ventes estimées et réalisées après raffinage de l’année 2014 uniquement. Ce qui nous amène à croire que les perceptions des années antérieures ne tiennent pas compte des recettes effectivement réalisées après raffinage.
La bonne nouvelle vient du fait que l’Etat, à travers le Bureau des mines et de la géologie du Burkina (BUMIGEB), a entrepris de procéder à ces vérifications au cours de cette année 2015. Enfin, la commission parlementaire a constaté que: «La plupart des sociétés minières, lors de l’expédition des lingots d’or non raffinés, ne font que l’estimation de la valeur de l’or. Elles ne tiennent donc pas compte de la valeur des autres métaux précieux contenus dans le minerai, notamment de l’argent». Une source nous informe cependant que depuis le mois de mars 2015, toutes les redevances sur les exportations d’argent sont calculées à l’exportation.
Elie KABORE
Le ministère des Mines doit respecter la réglementation
L’arrêté conjoint n°08-001/MCE/MEF portant conditions d’exportation de l’or produit industriellement au Burkina précise qu’à la fin de chaque pesée de l’or avant son expédition, un procès-verbal est rédigé et fait ressortir une estimation de la valeur de l’or en FCFA sur la base du cours de l’or du dernier fixing de Londres de la veille de l’expédition. La redevance ou royaltie est calculée sur la base de cette estimation.
Cette redevance est exigible dans un délai de 60 jours pour compter de la date de la pesée. Au plus tard le 31 décembre de chaque année, le producteur est tenu de présenter un état des ventes aux prix réels après raffinage. L’écart constaté entre les perceptions résultant de l’estimation initiale et les ventes réelles font l’objet d’une régulation à l’exercice suivant. Aussi, l’administration des mines pour vérifier la sincérité des données fournies par les sociétés minières procède en fin d’année à la vérification des factures finales du raffineur afin de relever les écarts s’il en existe entre les quantités d’or fin déclarées à l’exportation et les quantités obtenues après raffinage, et ainsi de procéder à des ajustements pour les redevances à payer ou à rembourser, conclut le ministre. Ce qui ne semble pas être le cas selon les résultats de l’enquête parlementaire. D’où des pertes de recettes.