En inscrivant la création du Fonds d’intervention pour l’environnement (Fie) dans le Code de l’environnement en janvier 1994, le Gouvernement voulait faire de cet instrument un outil privilégié de financement de la politique environnementale et du développement durable du pays. Mais son opérationnalisation a connu un long processus, malgré les objectifs nationaux en matière d’environnement, d’adaptation aux changements climatiques et de gestion des ressources forestières qui lui sont attachés.
Le décret devant être pris en Conseil des ministres pour préciser l’organisation et le fonctionnement de ce Fonds a tardé à voir le jour. Il faut attendre avril 2002 pour voir la création au sein de l’Office national de l’eau et de l’assainissement (Onea) d’un Fonds de dépollution des eaux usées industrielles dénommé Fodepi, présenté comme un guichet du Fonds d’intervention pour l’environnement et placé sous la tutelle technique du ministère de l’Environnement et sous la tutelle financière du ministère de l’Economie et des finances.
Le Fonds de dépollution industrielle a pour mission la mobilisation et la gestion de ressources financières destinées aux investissements de pré-traitement des eaux usées industrielles et d’acquisition de nouvelles technologies d’amélioration des procédés de dépollution.
Des sociétés, comme Tan Aliz, spécialisées dans le traitement des cuirs et peaux ont pu en bénéficier.
Plus tard, avec le boom minier, l’Etat a accordé un intérêt à la protection de l’environnement à travers un Fonds de réhabilitation de l’environnement. Ce compte est alimenté par les miniers auprès de la banque centrale. Ainsi, en décembre 2007, est institué le Fonds de préservation et de réhabilitation de l’environnement minier, en application des dispositions de l’article 78 du Code minier. Il s’agit d’un autre guichet du Fonds d’intervention pour l’environnement, prévu à l’article 11 du Code de l’environnement. Le Fie a donc vécu à travers ces deux principaux guichets.
Le décret de création et d’approbation des statuts adopté fin mai 2015 par le Gouvernement marque un tournant décisif dans l’opérationnalisation du Fie qui bénéficie du soutien des coopérations luxembourgeoise et suédoise, intéressées aux questions environnementales. Elles ont déjà apporté leur concours financier à hauteur d’un milliard de FCFA au Burkina, à travers des mécanismes de pré-tests du Fie effectués en 2013 dans les régions des Hauts-Bassins et du Centre-Ouest où 68 projets ont été initiés et mis en œuvre au niveau local par des services publics, des collectivités territoriales, des structures privées, des Ong et des associations.
Le deuxième appel à projets, financé par les mêmes bailleurs, lancé en 2014, a encore concerné les deux régions pré-citées et s’est élargi à celle du Nord. Il a ciblé des projets d’une durée maximum de 18 mois, couvrant des initiatives locales en matière de gestion durable des ressources forestières, de promotion des produits forestiers non ligneux, de recherche forestière et environnementale et d’adaptation aux effets néfastes des changements climatiques. 1,2 milliard de FCFA est prévu pour soutenir ces projets à mettre en œuvre dans les trois régions, soit 400 millions par région. Les bénéficiaires, une centaine, devraient, selon le programme du ministère de l’Environnement, recevoir leurs chèques courant juin.
Christian KONE
Financement du Fie
Selon le directeur des affaires juridiques et du contentieux du ministère de l’Environnement, Gontran Somé, les partenaires luxembourgeois et suédois sont prêts à injecter environ 6 milliards de FCFA dans le Fonds d’intervention pour l’environnement, intégré dès 2013 dans l’organigramme du département en tant que Etablissement public de l’Etat. Les autres sources de financement du Fie sont à l’étude par le ministère qui poursuit les réflexions en vue de trouver les opportunités de financement et de mobiliser les ressources au plan national. Les résultats montrent, affirme M. Somé, qu’on peut mobiliser dans le secteur de l’environnement autour de 7 milliards de FCFA par an, en plus du budget de l’Etat (185 millions demandés cette année).
Les mines, les forêts, la faune, les produits forestiers non ligneux sont ciblés, car une fiscalité pourrait y être affectée en plus des contributions volontaires à travers la responsabilité sociétale des entreprises, mais également grâce aux différentes amendes issues du contentieux de l’environnement.
«Nous avons constaté que dans le domaine de l’environnement, la fiscalité forestière est très faible. Celle qui est d’application de nos jours date des années 80. Pour couper un arbre centenaire, on paie 100 F CFA. C’est pareil pour la faune. Quand pour abattre un lion, on paye 5 millions ailleurs, au Burkina, il faut entre 600.000 et 800.000 F CFA. Les prix sont trop bas. Nous discutons de la pertinence et de l’opportunité d’aller vers de nouvelles taxes, surtout en ce qui concerne les produits forestiers non ligneux comme les lianes, le pain de singe, les feuilles de baobab et les plantes médicinales prélevées à des fins de commerce. Ceux qui prélèvent ces ressources devraient payer, car la loi dit que toute exploitation commerciale de produits forestiers donne lieu à un paiement. Ce qui n’est pas le cas, par exemple, pour les amandes de karité», a déclaré Gontran Somé.
Aussi, dans l’esprit du pollueur payeur, le décret portant contravention et amendes administratives applicables en matière d’emballage et de sachets plastiques prévoit qu’une part (25%) soit affectée directement au Fie. Cet argent servira à financer les actions de collecte, de traitement et de recyclage de ces matières non biodégradables.