Les 16 et 17 décembre derniers, les acteurs de la filière sésame du Burkina Faso ont tenu leur atelier national de concertations annuelles à Ouagadougou. Les échanges ont porté sur le thème: «Commercialisation du sésame burkinabè: enjeux, défis et perspectives pour un meilleur positionnement sur le marché international ». Selon les organisateurs, l’objectif cette année était de mieux structurer la filière à travers la mise en place d’un système de collecte du sésame, de traçabilité de l’exportation, ainsi que le renforcement du système d’information sur le marché. Des deux jours de concertations sont sortis des résultats approuvés par les différents acteurs de la filière tels que la mise en place d’un schéma de traçabilité du sésame, la mise en place d’un système de collecte, etc. Cet atelier se tient à un moment où l’image de la filière est ternie par certains incidents produits à l’exportation. En effet, par deux fois cette année, des cargaisons de sésame à destination du Japon ont été contrôlées positif à des substances toxiques. En juillet dernier, suite à des contrôles sanitaires effectués sur le sésame exporté vers le Japon, il a été détecté un taux élevé d’imidaclopride (un insecticide). C’est au total plus de 72 tonnes de sésame qui étaient incriminées. Le second cas de sésame impropre à la consommation a été détecté à Nagoya au Japon, incriminant cette fois-ci 509,94 tonnes de sésame. Cette situation vient porter un coup dur aux échanges commerciaux entre les deux pays et a pour conséquence de décrédibiliser le produit burkinabè sur le plan international.
D’après ses enquêtes, le ministère du Commerce impute cette situation aux exportateurs clandestins qui sillonnent les villes et villages du Burkina Faso sans reconnaissance officielle pour collecter le sésame. Cette situation est également rendue possible à cause de la forte demande du sésame lors de la campagne précédente, dont le kilogramme se négociait autour 1.000 FCFA. Ainsi, pour faire plus de profits, certains producteurs ont vendu le sésame destiné à l’ensemencement. « Le sésame a connu un boum la campagne dernière. Les prix étaient fixés jusqu’à 1.000 F CFA le kilo. Cette situation a conduit certains paysans à vendre leur semence. Ainsi, le sésame incriminé au Japon était destiné à la semence et non à la consommation», affirme le conseiller technique du ministre du Commerce et de l’industrie, Alain Tayan. Le Japon, deuxième pays importateur du sésame burkinabè, est désormais plus regardant et méfiant quant à la qualité du sésame et procède automatiquement à des contrôles rigoureux. Cette information vite répandue conduit également les autres acheteurs à être méfiants. Pour éviter de pareilles situations à l’avenir, des résolutions ont été prises lors de l’atelier et visant à plus de contrôle de qualité avant l’exportation, comme l’explique Alain Tayan: «Il y aura désormais un cahier des charges destiné aux exportateurs afin d’organiser le milieu. Il y aura des codes de conduite à respecter.
Désormais, le contrôle de la qualité du sésame sera fait par les autorités qui certifieront de sa qualité avant son exportation. Cette résolution vient trancher d’avec les vieilles habitudes qui étaient de laisser cette responsabilité à l’exportateur. Nous sommes conscients des désagréments que cela pourrait causer, mais si nous voulons éviter que des situations de rejet de notre sésame ne se reproduisent comme au Japon, il nous faut réagir. Ce problème porte un coup à l’image du pays et de son sésame. Désormais, tous les autres Etats ont l’œil sur nous et risquent d’intensifier les contrôles de qualité sur tout sésame en provenance du Burkina Faso. Ce qui n’était pas forcement le cas ». Ces différentes résolutions sur le contrôle strict du sésame à l’exportation sont aussi une manière pour le Burkina Faso de mettre un peu plus de rigueur et de sérieux dans ses échanges commerciaux. Dans quelques années, de nombreux producteurs vont se lancer dans sa culture, surtout les producteurs de coton, et cela n’est pas sans risque dans la qualité du produit. Des mesures ont été prises afin de mieux structurer la filière, conseiller et informer les paysans quant aux mesures d’hygiène à respecter afin d’avoir un produit de bonne qualité. « La culture de sésame va continuer à augmenter. Beaucoup de producteurs de coton vont s’y mettre.
Le problème est qu’un champ de coton qui se transforme en champs de sésame peut être préjudiciable à la qualité du sésame, car la culture du coton demande l’utilisation de beaucoup de pesticides. Il nous faut donc encadrer et mieux structurer la filière afin d’éviter ces problèmes », explique Paulin Zambélongo, expert en politique commerciale du Cadre intégré renforcé (Cir).
Germaine Birba
Désormais, le contrôle de la qualité du sésame sera fait par les autorités qui certifieront de sa qualité avant son exportation
Le sésame en pôle position
Ces dernières années, le sésame a connu une forte croissance. On l’estime à 143% entre 2009 et 2013, selon les chiffres du ministère du Commerce et de l’industrie. Son exportation a également connu une croissance de 129%, plaçant aujourd’hui le sésame à la première place des produits agroalimentaires exportés.
Le sésame représente 7% des recettes d’exportation. Sa croissance moyenne annuelle en production est de 27,3% et de 25,34% pour l’exportation. Cette croissance accélérée propulse le Burkina Faso à la 5e place des pays exportateurs de sésame, avec 5,9% des parts du marché mondial. En 2013, la valeur du sésame exporté se chiffrait à 77 milliards, pour un volume de 113.000 tonnes commercialisées.