Nombreux sont les entreprises et les particuliers qui ont subi des dommages lors de l’insurrection populaire du 30 octobre dernier. La crainte de tous est de savoir comment minimiser ces pertes. Certaines entreprises avaient des contrats d’assurance avec des sociétés de la place. Selon l’assurance contractée, elles seront indemnisées ou pas.
En effet, suite aux évènements survenus lors de la crise en Côte d’ Ivoire, l’espace de la Conférence interafricaine des marchés de l’assurance (Cima) a mis en place une clause dénommée clause Fanaf. Il s’agit de deux conventions relatives à l’assurance de dommages causés par les actes de vandalisme, les grèves, émeutes, mouvements populaires, les actes de sabotage non commis dans le cadre d’actions concertées et de l’assurance contre les risques spéciaux tels que les tempêtes, fumées, chute d’appareils de navigation aérienne et d’engins spatiaux. Les évènements du 30 octobre sont donc potentiellement des évènements couverts, encore faut-il avoir souscrit à une prime. Selon les explications de Jérémie Bado, chef de service assurances et risques divers à la Sonar, de nombreuses entreprises burkinabè ont souscrit à la clause Fanaf. Si l’une de ces entreprises a été affectée par les émeutes, l’assurance veillera à ce qu’elle soit indemnisée. Il nous explique en quoi consiste la clause Fanaf : «En ce qui concerne les édifices et les bâtiments, il y a un certain nombre d’événements que, d’un commun accord, l’assureur et l’assuré s’engagent à couvrir, avec l’accord de l’assuré. Ensemble, ils décident de ce qu’ils peuvent couvrir et les événements pour lesquels l’assuré a les moyens de payer. Et pour ces événements, il peut arriver que l’on décide de couvrir les grèves et les émeutes, dans le cadre d’un contrat d’assurances.
Depuis les événements en Côte d’Ivoire, nous avons essayé d’encadrer cette couverture. La clause Fanaf fait suite à une étude sur ces événements. Si un client veut que cette garantie fasse partie des risques couverts, il peut le faire». Toutefois, les sociétés d’assurances tiennent à lever l’amalgame entre émeutes et mutineries. En effet, la clause Fanaf ne tient pas compte des mutineries. «Lorsqu’un soulèvement est d’ordre militaire, il n’est plus de notre ressort, mais de celui de l’Etat», affirme M. Bado. Ce fut le cas lors de la mutinerie qu’a connue le Burkina Faso en 2011. Les entreprises touchées n’ont pas eu droit à une indemnisation de la part de leurs sociétés d’assurances, mais plutôt de l’Etat burkinabè. Compte tenu des charges énormes que doivent supporter les sociétés d’assurances dans ce cas de figure, la clause est, en général, souscrite par les grandes entreprises et non les petites qui n’ont pas toujours les moyens d’apporter les 10% des charges imputables à l’assuré. En général, la limite de la couverture se fait d’un commun accord. Elle exclut cependant la couverture des véhicules. Selon les explications des sociétés d’assurances, leur principe est de couvrir un certain nombre de risques, et la couverture de ces risques est appréciée par l’assureur selon la fréquence, la capacité pour les clients à payer les charges des sinistres et le nombre de personnes capables de s’assurer.
Plus les assurés sont nombreux, mieux l’assureur arrive à mutualiser le risque. «C’est le principe dans tout ce que nous couvrons comme évènement. Nous nous sommes rendu compte que ce risque est difficilement maîtrisable. Ainsi en cas d’événements, ce que nous avons à payer est si énorme que nous avons décidé à l’unanimité sur le marché de ne pas le couvrir pour le moment. Cela peut changer. Mais si les assureurs ne s’y engagent pas pour le moment, c’est parce qu’ils ne maîtrisent pas encore bien les contours du risque», affirme le chef de service assurances et risques de la Sonar.
Une mesure qui ne passe pas
Les émeutes, grèves et soulèvements populaires sont des évènements assurables. La clause Fanaf permet de prendre ces cas de figure en charge. Cependant, les véhicules ne bénéficient pas de ces mêmes avantages. Beaucoup de voitures ont été incendiées lors de ces évènements. Les propriétaires de ces voitures ne pourront pas avoir recours à leurs assureurs pour une prise en charge, quelle que soit la nature de l’assurance contractée, même celle de tous risques. Cette loi n’est pas du goût de tous. L’on ne comprend pas pourquoi il en est ainsi.
Lassina Koné, directeur d’une maison de location de voitures, se dit peiné par cette mesure. Lui qui croyait être à l’abri avec son assurance tous risques devra débourser lui-même des fonds pour les frais de réparation des voitures qui ont subi des dommages lors des émeutes. «L’assurance dit ne pas être en mesure de prendre en charge ce cas de figure. Nous sommes déboussolés, car il nous faudra réparer nos voitures nous-mêmes. Celles qui ont été incendiées sont une perte pour notre entreprise», déplore-t-il.Germaine BIRBA