D’abord appelé centre de formation professionnelle, il est devenu, depuis plus d’une décennie, le Centre des métiers de l’eau (CEMEAU). Cette structure rattachée à l’Office national de l’eau et de l’assainissement (ONEA), malgré son âge, semble ne pas être bien connue. Pourtant, des milliers de personnes sont passées par là afin de se perfectionner dans les métiers de l’eau. La responsable du Cemeau, Fatimata Sarambé /Ouédraogo, dévoile la structure et les activités qui y sont menées, ainsi que ses ambitions. Voici les métiers de l’eau dans tous leurs états.
– L’Economiste du Faso : Depuis quand le Centre existe-t-il ?
Fatimata Sarambé /Ouédraogo, chef de département du Centre des métiers de l’eau : Dans son appellation centre des métiers de l’eau (CEMEAU), il date de 2010. Mais le centre a toujours existé et ce, depuis les années 1990. A cette période, il s’appelait centre de formation professionnelle de l’ONEA.
– A sa création, à quel besoin le centre répondait-il ?
Le besoin est tout simple. Vous savez que l’ONEA est l’entreprise de production et de distribution d’eau au Burkina, qui a toute une histoire et des évolutions grandissantes au fil des ans. Ceci étant, vu la spécificité de l’activité qui est de produire et de distribuer de l’eau de qualité, celle qui doit préserver la santé des populations, il faut bien que les acteurs qui y travaillent soient qualifiés.
Ces connaissances doivent être mises à jour régulièrement. Il n’est pas donné à tout le monde de pouvoir offrir des formations en cas de besoin, telles que l’ONEA le souhaite, au fur et à mesure que l’entreprise grandit. Il allait de soi qu’on trouve une structure adéquate, à défaut d’externaliser ces formations, et de mettre en place un centre de formation qui va prendre en charge le perfectionnement continu du personnel. Voilà les premières motivations qui ont amené à la création de ce centre dans les années 1990.
– Alors, comment accède-t-on au CEMEAU ?
Le Centre a connu une transformation en 2010, parce que l’ONEA a trouvé nécessaire d’ouvrir les portes de son centre de formation, avec tout le savoir-faire en matière d’eau et d’assainissement et tout le savoir-faire en termes de renforcement des capacités des acteurs. Ce qui a permis à d’autres acteurs qui n’avaient pas accès à ce centre de pouvoir bénéficier de ses formations.
C’est à la faveur de la décentralisation et de la réforme du système de gestion des infrastructures hydrauliques qu’il y a eu une émergence de nouveaux acteurs, avec de nouveaux besoins. Ces besoins ne sont pas forcément pris en compte par l’offre de formation du privé.
L’ONEA a été interpellé et il a bien voulu transformer son centre. Au lieu que ce soit uniquement pour son personnel, que l’ensemble des acteurs du secteur eau et assainissement qui veulent obtenir une mise à niveau puissent y trouver le cadre. Alors, le centre doit fonctionner et ses prestations ne sont pas gratuites.
Mais les frais ne sont pas aussi comparables aux coûts du marché, parce que l’ONEA est un service public. C’est juste pour permettre de prendre en charge les dépenses liées à une session de formation. Généralement ce sont des groupes qui expriment le besoin de formation. Nous l’analysons pour voir si nous avons les compétences et les capacités pour la dispenser. Après, on s’accorde sur les coûts et la période.
– Au-delà des acteurs nationaux, y a-t-il des acteurs étrangers ?
Bien sûr. C’est d’ailleurs notre vision que de devenir la référence en matière de formation professionnelle dans le secteur de l’Approvisionnement en eau potable et assainissement (AEPA) dans la sous-région. Pour l’instant, nous n’avons pas reçu des sollicitations formelles mais par moment, on a eu à accorder des appuis à certaines entreprises d’eau de la sous-région. Des experts de l’ONEA effectuent des missions dans des entreprises d’eau de la sous-région et tout cela est appelé à être géré par le CEMEAU. On a des cas isolés de sollicitation par moment.
– Parlez-nous des métiers dans lesquels vous formez les stagiaires?
Nous avons défini quatre grands domaines que sont, l’approvisionnement eau potable et assainissement, gestion des services d’eau et d’assainissement, la décentralisation des services eau et assainissement en lien avec la gouvernance des services et tout le volet qualité, sécurité, hygiène et environnement.
Par exemple, pour les techniques AEPA, nous avons le domaine de la production d’eau potable, le réseau de distribution, le réseau d’assainissement collectif et autonome, le traitement, les pompages, etc. Nous avons proposé des offres qui continuent d’être améliorées. Dans la gestion des services, nous avons aussi des modules. Il y a des offres concernant la maîtrise d’ouvrage communal, une démarche qualité en lien avec le secteur AEPA. Pour toutes ces questions, nous avons tenté de proposer quelque chose au public.
– Est-ce que les communes sont intéressées par vos offres ?
Les communes sont hautement intéressées même si certaines ne comprennent toujours pas. De façon générale, les questions de formation viennent en dernière position, si on ne les oublie pas, dans la définition des projets. C’est timide tout de même, mais elles en sont conscientes. Nous avons approché certaines avec de potentiels bailleurs pour les appuyer dans la gestion des nouvelles compétences qui leur ont été transférées à la faveur de la décentralisation.
– Combien de stagiaires sont passés par le CEMEAU ?
A ce jour nous avons, pas moins de mille stagiaires qui sont passés par le centre. La majeur partie reste le public de l’ONEA parce qu’elle a son plan de formation que le CEMEAU exécute annuellement. A l’extérieur de l’institution aussi, nous avons réalisé pas mal de formation avec certains projets. Actuellement au moins quatre communes sont là pour la formation des artisans des ouvrages d’assainissement. Des communes du Sud-Ouest sont aussi passées pour la maîtrise d’ouvrage communale.
– Y a-t-il un retour sur les compétences de vos stagiaires ?
L’exécution d’une formation demande que, in situ, il y ait un feedback pour savoir ce que les gens pensent de ce qu’ils ont appris. Nous faisons une petite évaluation pour permettre d’avoir les premières impressions. Ceci étant, nous avons aussi ce que nous appelons des évaluations à froid. Nous sommes repartis, par exemple, cette année dans le Sud-Ouest pour voir comment les anciens stagiaires exécutent ce qu’ils ont appris.
– Le CEMEAU fonctionne-t-il de façon autonome ou sur le budget de l’Onea ?
Pour l’instant, nous sommes le bébé bien dorloté de l’ONEA. Nous n’avons pas de budget propre. Nous avançons à petit pas vers l’autonomie, et nous travaillons à cela.
– Quel est alors votre rôle dans le fonctionnement de l’ONEA ?
Chaque année, l’ONEA fait son plan de formation et c’est à nous de l’exécuter. Ce plan a un budget de 300 à 400 millions de F CFA. Par an, ce sont entre 100 et 150 sessions de formation que nous organisons pour l’ONEA.
– Le Centre fait-il des formations diplomantes ?
Oui. C’est notre projet à court terme. Nous y travaillons. Mais en attendant, nous faisons de la formation qui qualifie. Pour les diplômes, nous pensons déjà à la filière plomberie, réseau, eau et assainissement.
– En termes de perspectives à moyen et long terme, que fera le centre ?
D’abord le Centre prévoit être la référence, et, petit à petit, nous voulons avoir des professionnels dans le secteur eau et assainissement. Notre ambition c’est de sortir des professionnels avec le niveau d’agent de maîtrise et que ce soit des gens qui aient une certaine qualification pour accomplir les tâches opérationnelles dont on a besoin sur le terrain. C’est ce que nous voulons combler comme insuffisances, très prochainement.
Pour terminer, que retenir du Centre ?
J’insiste pour dire que notre ambition, c’est de développer les compétences professionnelles des personnels des secteurs de l’eau potable et de l’assainissement. Nous avons pour objectif d’être un cadre d’information et de sensibilisation. Aujourd’hui, si vous avez besoin d’informations en lien avec l’eau potable et l’assainissement, ce n’est pas évident qu’on en trouve et on ne sait pas vers qui se tourner. Cela figure dans nos objectifs : avoir des formations pour ceux qui en auront besoin et bien sûr, nous positionner comme un centre de référence.
En plus, pour ceux qui font leurs premiers pas dans les métiers de l’eau et de l’assainissement, nous avons en projet ces formations initiales qui leur permettront de s’inscrire et de sortir comme professionnels. Pour ceux qui sont déjà en activité, nous avons pas mal de thèmes de formation et, bientôt, notre catalogue va sortir. Enfin, le public a de très bonnes raisons de s’adresser à nous. C’est vrai que nous ne sommes pas très bien connus, mais nous leur proposons une offre de formation qui répond aux besoins. Les thèmes sont novateurs et nous avons des méthodes de formation très adaptées parce que nous nous adressons à un public qui n’est pas d’un certain niveau.
Il y a un capital d’expertise de plus de 90% de nos formateurs qui viennent de l’ONEA.
Ce sont nos experts eux-mêmes qui sont nos formateurs. Si nous voulons former une équipe de plombiers, on n’a pas besoin d’aller chercher très loin. Nos infrastructures et équipements sont aussi adaptés et modernes.
Les offres de formation
Le CEMEAU est issu de la transformation du Centre de formation professionnelle (CFP) de l’ONEA.
Cette transformation visait à répondre aux besoins des acteurs du secteur, à travers un curriculum à même de répondre aux attentes de tous les acteurs du Programme national approvisionnement en eau potable et l’assainissement (PN-AEPA) : le secteur privé, les Associations des usagers de l’eau et les ONG.
Des formations sur les métiers de l’eau sont assurées par les cadres de l’ONEA dans les domaines suivants :
– hydraulique,
– maintenance (électromécanique et mécanique),
– gestion clientèle,
– gestion financière,
– gestion des ressources humaines,
– traitement de l’eau et distribution,
– plomberie.
Propos recueillis par Jean De Baptiste OUEDRAOGO