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Non-déclaration des propriétaires «réels» des sociétés minières: bientôt des sanctions judiciaires

• Une recommandation de la Cour des comptes

• Une obligation depuis janvier 2020

• Parfaire le dispositif règlementaire

Depuis le 1er janvier 2020, toutes les sociétés extractives implantées au Burkina Faso ont l’obligation de faire connaître le/les noms du propriétaire réel ou des vrais propriétaires. Mais dans la pratique sur le terrain, cette disposition peine à se matérialiser. Malgré tous les dispositifs règlementaires, des sociétés minières ne se sont pas encore exécutées. Ce constat a été relevé par la Cour des comptes (CC) qui, à travers un rapport intitulé « Audit de performance du cadre juridique et institutionnel de la mobilisation des droits et taxes issus de l’activité extractive de l’or et des autres substances précieuses au Burkina Faso, sur la période 2017-2023 », a donné l’information le jeudi 3 avril 2025, à Ouagadougou. L’obligation de déclarer le/les noms du «vrai» propriétaire se fait dans un registre tenu par le Tribunal de commerce de Ouagadougou (TCO).
Les fins limiers de la Cour des comptes ont fait un tour au tribunal, ont eu des entretiens avec le Greffe du TCO et ont consulté le registre des bénéficiaires effectifs. Ces derniers ont remarqué que les obligations peinent à être respectées. Les enquêteurs de la Cour des comptes attribuent cette timidité du respect de la loi à trois causes majeures.
La non-application des sanctions, le manque de moyens (financiers, logistiques et humains) pour entreprendre des investigations aux fins de vérifier l’identité des bénéficiaires réels des titres et la non-informatisation du processus de déclaration. Pour rendre effective cette déclaration, la Cour des comptes suggère qu’une collaboration soit envisagée avec la Cellule nationale de traitement des informations financières (CENTIF), se basant sur le rôle des autorités de supervision et faisant appliquer la loi n°016-2016/AN du 03 mai 2016 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LBC/FT). Les Avocats, les Notaires et Huissiers, lors de la rédaction des actes de sociétés (statuts, règlements intérieurs) et les juges devraient aussi, dans le cadre du processus de délivrance des RCCM, procéder aux vérifications selon le guide qui a été élaboré par la CENTIF. Lesquelles vérifications peuvent être faites avec une requête adressée à la CENTIF qui dispose d’un réseau à travers le monde par le Groupe d’action financière (GAFI) et le Groupe intergouvernemental d’action contre le blanchiment d’argent en Afrique de l’Ouest (GIABA). Il ressort du TCO que l’informatisation du registre est en cours, mais tarde à se concrétiser. Pendant ce temps, l’identification des bénéficiaires effectifs reste approximative, et cela peut entraver la poursuite des avoirs distraits. Pour rendre l’application effective de la loi portant sur les vrais propriétaires des sociétés minières, le rapport recommande, d’une part, la nécessité de la mise en branle de mesures d’injonction du juge, et d’autre part, l’application de peines pécuniaires.

Que dit la loi sur les propriétaires réels ?
Il est recommandé aux termes de l’exigence 2.5 de la norme ITIE, que les pays mettant en œuvre l’ITIE tiennent un registre public des bénéficiaires effectifs des entreprises qui font une demande de licence ou de contrat pétrolier, gazier ou minier, de production ou d’exploration, ou y détiennent une participation directe, et cela devra inclure l’identité de leurs bénéficiaires effectifs, leur degré de participation, et les modalités d’exercice de cette participation ou du contrôle desdites entreprises. Les dispositions légales nationales en matière de déclaration de propriété effective sont récentes. Il s’agit du Décret n°2021-0493/PRES/PM/MINEFID/MEMC/MJDHPC/MICA du 07 juin 2021 portant obligation de déclaration de la propriété effective des entreprises extractives, qui a été revu avec le Décret n°2022-0234/PRES-TRANS/PM/MATDS/ MJDHRI/MEFP du 31 mai 2022 portant obligation de déclaration et de tenue du registre des bénéficiaires effectifs des personnes morales et des constructions juridiques et de l’article 96 du Code général des impôts. Pour les Sociétés anonymes (SA), il existe au sein de l’entreprise un registre des titres nominatifs prévu par l’AUSCGIE (746-1 et 746-2) dont les Commissaires aux comptes doivent vérifier la tenue et en faire mention dans leur rapport à l’AGO. Le Décret n°2022-0234 ci-dessus cité fait obligation à tout titulaire de titres miniers ou d’autorisations, aux personnes qui détiennent des parts dans des entreprises ayant fait une demande de TMA, ou à tout demandeur de TMA à déclarer les bénéficiaires réels des titres.
Synthèse de Ambéternifa Crépin SOMDA

 

Encadré

La Cour des comptes recommande au ministre chargé de la justice de :

– mettre en place une plateforme automatisée de déclarations des bénéficiaires effectifs ;
– faire appliquer les sanctions prévues en cas de manquements à l’obligation de déclaration du bénéficiaire effectif.

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