• Dans le rapport annuel général d’activité (RAGA) 2022
• 121 véhicules contrôlés en irrégularités en 3 jours
• Des ordres de missions antidatés
La réduction du train de vie a la peau dure au Burkina Faso. C’est le énième constat fait par l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et de Lutte contre la corruption (ASCE-LC), à travers le Rapport annuel général d’activités (RAGA) 2022. Lequel rapport a été présenté aux hommes de médias, au cours d’une conférence de presse le 6 février 2024, à Ouagadougou, animée par le Contrôleur général d’Etat par intérim, Urbain Millogo. En 2022, l’ASCE-LC a initié une opération ponctuelle de contrôle de régularité et de conformité des ordres de missions des agents publics et de l’utilisation des véhicules de l’Etat, des collectivités locales, des établissements publics et autres projets et programmes.
Ce contrôle, qui a duré 3 jours, a couvert 4 axes d’accès à la ville de Ouagadougou. Il ressort du constat terrain un abus dans l’utilisation des véhicules de l’Etat. En trois jours seulement, 121 véhicules et leurs missionnaires ont été appréhendés pour des irrégularités, dont 7 véhicules mis en fourrière. Sur les 121 véhicules et leurs missionnaires appréhendés, certains possédaient des visas des ordres de missions antidatés. Une infraction qui permet aux auteurs d’abuser des frais de mission, à en croire l’ASCE- LC. « Ce mode opératoire permet aux missionnaires de revenir à leur lieu de résidence, avant la date de retour prévue et d’abuser indument des frais de mission qu’ils ont perçus », soulignent les contrôleurs. Cet état de fait est de la responsabilité partagée des missionnaires et des agents publics chargés des visas des ordres de missions antidatés.
Aussi, certains conducteurs avaient des ordres de missions visés par des personnes autres que les agents de police, de gendarmerie et du Parquet qui, selon la règlementation en vigueur, sont les seules habilités à viser les ordres de missions des agents publics. Pire, des missionnaires ont été appréhendés dans des localités n’entrant pas dans le champ de leur ordre de mission, mais aussi des missionnaires appréhendés sans ordres de missions hors de leur circonscription territoriale.
Toutes ces infractions connues en trois jours ont amené les contrôleurs à mentionner que cette situation traduit le fait que des agents publics profitent des moyens de l’Etat à d’autres fins. Les personnes assermentées à l’ASCE-LC ont remarqué l’absence de certains membres de la mission, lors du contrôle, mais qui perçoivent indument les frais de mission. L’abus de l’utilisation de véhicules de l’Etat a été constaté par le fait que certains agents publics en font des usages personnels. Ceux-ci, dans leur mission, transportent des personnes étrangères dans les véhicules de l’Etat.
Les indemnités spéciales et la prime globale d’alimentation aux FDS est conforme aux règles de la dépense budgétaire
Si le secret défense a souvent été évoqué par l’armée burkinabè pour « fermer » ses casernes à tout contrôle dans la « soupe », elle a fini par les ouvrir aux contrôleurs de l’ASCE-LC. Et cette grande muette a des choses à se reprocher sur le plan des dépenses financières. Sur la période 2016-2021, les contrôleurs ont constaté des irrégularités au niveaux de la commande publique ; des indemnités spéciales des militaires en opération intérieure ; des allocations alimentaires ; du carburant ; de la gestion matérielle des stocks des armements, munitions et optiques (AMO). Pour faire fonctionner l’armée, la hiérarchie militaire, avec en tête le ministère de la Défense et des Anciens combattants, a lancé 241 commandes publiques d’une valeur globale de 482.048.128.759 FCFA. En feuilletant les rapports financiers, l’ASCE-LC a relevé un cumul des fonctions incompatibles sur la seule personne de DCIM.
Celui-ci, en plus d’être l’ordonnateur, est aussi Directeur de l’administration et des finances, contrôleur financier dans la chaîne de mise en œuvre des marchés publics. Une incompatibilité qui est susceptible d’entrainer des pertes financières. Autre révélation faite par le Contrôleur général d’Etat par intérim est qu’une même personne physique a vu ses entreprises rafler 8 contrats d’un montant de 75.106.677.520 FCFA, soit un taux de 89,94%, sur 14 contrats d’un montant de 83.507.507.233 FCFA.
Ces contrats obtenus portent sur l’acquisition des armements, munitions et optiques (AMO). Des fautes de gestion ont été constatées dans la gestion matérielle des stocks des AMO, caractérisée par le non-respect des normes de sécurité en matière de stockage des matériels AMO, comportant ainsi de nombreux risques.
Les contrôleurs de l’ASCE-LC notent, toutefois, quelques motifs de satisfaction dans la gestion financière de l’armée. « Les indemnités spéciales, ainsi que la prime globale d’alimentation des hommes sur le théâtre des opérations intérieures, la mission a constaté, sur l’échantillon examiné, qu’elles sont effectivement payées dans les délais prescrits », ont-ils affirmé. o
Ambéternifa Crépin SOMDA
Encadré
Recommandations aux premiers responsables des entités des agents fautifs :
-Faire rembourser par les agents fautifs le préjudice financier ;
-Prendre les sanctions administratives à l’encontre des agents fautifs ;
-Prendre les sanctions administratives à l’encontre des agents fautifs qui ont visé des ordres de missions antidatés ou fictifs ; prendre des mesures pour faire cesser ces pratiques.o