• Et 4,8% en 2024 et 5,1% en 2025
• Une reprise tirée par la consommation privée
• Blocage possible : instabilité politique
En pleine crise sécuritaire couplée avec la pandémie de Covid-19, l’économie burkinabè a fait preuve d’une résilience sans pareille en 2021. A titre illustratif, la représentation de la Banque mondiale au Burkina Faso, qui suit de près l’évolution économique du pays, note une reprise économique forte de 6,9% en 2021. Malheureusement, moins d’un an, cet élan a enregistré une chute vertigineuse de plus de quatre points. Les soubresauts sociopolitiques (2 coups d’Etat en 2022) sont-ils passés par là ?
Dans son rapport annuel intitulé « Note sur la situation économique au Burkina Faso. Chapitre spécial : renforcer la résilience financière face aux risques climatiques », publié en avril 2023, la Banque mondiale le pense. « Ces changements politiques ont ajouté à l’incertitude déjà élevée et ont déclenché une forte réduction du soutien financier de la communauté internationale, tout en affectant négativement l’investissement privé, l’investissement direct étranger (IDE) et la consommation privée », soulignent les rédacteurs du rapport. En effet, en 2022, la croissance du PIB du Burkina Faso a connu une décélération pour atteindre 2,5%, dû principalement à une baisse de l’activité minière de 13,7%, à la suite des fermetures de quelques mines.
Fort heureusement, fait savoir le rapport, une reprise « timide » de la croissance économique est annoncée pour les trois années à venir, mais il faut rester prudent. La croissance du PIB réel devrait atteindre 4,3% en 2023, 4,8% en 2024 et 5,1% en 2025. L’investissement privé devrait s’accélérer en 2024 et 2025, dans l’hypothèse d’un retour au régime civil, et contribuer en moyenne à hauteur de 2,8 points de pourcentage à la croissance sur la période 2024-2025. En 2023, la consommation privée devrait être le principal moteur de croissance, suivie par la consommation publique, en raison de la poursuite de l’augmentation des dépenses publiques.
Le secteur des services (+2,8 points de pourcentage) devrait rester le principal moteur de croissance du côté de l’offre, grâce au soutien continu du gouvernement à l’amélioration de la prestation de service de l’administration publique et des réseaux routiers (ruraux) dans les zones touchées par le conflit et/ou récupérées par le gouvernement. L’agriculture devrait contribuer à la croissance à hauteur de 1 point de pourcentage, tandis que l’industrie (+0,1 point de pourcentage) devrait redresser lentement, après son ralentissement de 2022 (-1,2 point de pourcentage).
Barrer la route à l’insécurité
D’après le rapport, maintenir la reprise d’une croissance en hausse n’est pas une garantie. Et pour cause, le document souligne que les perspectives de croissance sont très incertaines, notamment, en raison de l’insécurité et de l’instabilité politique. Bien que l’activité minière, qui contribue de manière importante au PIB et aux recettes publiques, doive reprendre en 2023, cette reprise est loin d’être garantie.
L’impact économique de la guerre en cours en Ukraine a été mentionné dans le document. Celui-ci se fait principalement sentir par la hausse des prix mondiaux des denrées alimentaires, des carburants et de l’énergie, étant donné que les échanges commerciaux, les investissements et les liens migratoires (vers ou depuis la Russie et l’Ukraine) sont limités. Bien que les prix internationaux des céréales et des carburants aient baissé par rapport aux sommets atteints à la mi-2022, une nouvelle escalade de la guerre ou l’échec des accords d’exportation de céréales risquerait de déclencher à nouveau une hausse des prix, fait savoir le rapport.
Une hausse des prix aggraverait l’insécurité alimentaire. D’un côté, la hausse des prix de l’or profiterait au Burkina Faso, lui permettant de renforcer les comptes courants et budgétaires. Enfin, les secteurs de l’agriculture et de l’élevage, essentiellement pluviaux, qui représentent environ 20% du PIB et emploient plus de 90% des pauvres du pays, restent très vulnérables aux chocs climatiques et aux catastrophes naturelles telles que l’infestation parasitaire de 2022.o
Ambéternifa Crépin SOMDA
Encadré
Hausse de plus de 40% des dépenses sécuritaires
Le budget du Burkina Faso pour la défense et la sécurité en 2023 est 40,8% plus élevé qu’en 2022 et devrait atteindre 21,3% des dépenses publiques totales. L’augmentation de l’allocation pour la défense et la sécurité se fait au détriment des dépenses des ministères sectoriels, notamment, l’Urbanisme (-29,3%), les Sports (-19,2%), la Communication (-16,1%), la Santé (-9%) et les Infrastructures (-6,8%). Les pressions continuent sur les dépenses liées aux besoins de sécurité et aux salaires du secteur public, ainsi que les difficultés rencontrées dans la mobilisation des recettes pourraient exercer une pression supplémentaire sur le budget du gouvernement. La matérialisation de ces risques pourrait entraver la capacité du gouvernement à faire face aux multiples crises qui s’aggravent (y compris l’insécurité alimentaire) tout en ayant un impact négatif sur les projections macroéconomiques de base.
Source : Rapport annuel Banque mondiale intitulé « Note sur la situation économique au Burkina Faso.